Phosphatherium escuilliei Gheerbrant, Sudre & Cappetta, 1996
publication ID |
https://doi.org/ 10.5281/zenodo.5375224 |
persistent identifier |
https://treatment.plazi.org/id/7B6C9F24-D65B-FF9D-7AE7-627B82B3B7C2 |
treatment provided by |
Marcus |
scientific name |
Phosphatherium escuilliei Gheerbrant, Sudre & Cappetta, 1996 |
status |
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Phosphatherium escuilliei Gheerbrant, Sudre & Cappetta, 1996
HOLOTYPE. — MNHN PM2 , fragment de maxillaire gauche avec M2-1, P4-3. Localité TS?, Sidi Daoui, Secteur Grand Daoui, Ouled Abdoun.
MATÉRIEL RAPPORTÉ. — MNHN PM 1, fragment de maxillaire gauche avec dP4 et M1 ( Gheerbrant et al. 1996, 1998); localité RIV-1? in Gheerbrant et al. (2003), Recette IV, Secteur Grand Daoui, Bassin Ouled Abdoun.
OCP-CPSGM MA8 ( Figs 16 View FIG A-C; 21A), mandibule gauche préservant m3-1, p4-3 et au moins 4 alvéoles antérieurs, dont un pour l’incisive antérieure agrandie, symphyse et branche montante; localité exacte inconnue, Recette IV (Trémie), Secteur Grand Daoui, Bassin Ouled Abdoun. Don F. Escuillié/ Rhinopolis.
MNHN PM 11 ( Fig. 16 View FIG D-G), incisive centrale i1 agrandie; localité exacte inconnue, Secteur Grand Daoui. Don F. Escuillié.
OCP-CPSGM MA12 ( Figs 5E View FIG ; 10C View FIG ), avant-crâne préservant les deux maxillaires, mais seulement la rangée dentaire droite M3-1, P4-2; localité exacte inconnue, Sidi Daoui, Secteur Grand Daoui, Bassin Ouled Abdoun. Don F. Escuillié/Rhinopolis.
MNHN PM 13 ( Figs 18 View FIG G-I; 21F), fragment de dentaire droit avec m3-2 (m3 en cours d’éruption); localité RP13-3? (32°52,63’N, 6°38,30’W), Sidi Daoui, Secteur Grand Daoui, Bassin Ouled Abdoun.
MNHN PM14 ( Figs 18 View FIG D-F; 21G), fragment de dentaire gauche avec m3 ; localité RP13-3? (32°52,63’N, 6°38,30’W) (idem MNHN PM13 ), Sidi Daoui, Secteur Grand Daoui, Bassin Ouled Abdoun GoogleMaps .
MNHN PM17 ( Figs 3 View FIG ; 4 View FIG ; 10F View FIG ; 11 View FIG ), crâne endommagé ; localité RP13-2 (« poste 4 », 32°52,40’N, 6°38,00’W), Sidi Daoui, Secteur Grand Daoui, Bassin Ouled Abdoun.
OCP DEK/GE 305 ( Figs 1 View FIG ; 2 View FIG ; 10D View FIG ), crâne subcomplet déformé; localité TS5 (32°49,85’N, 6°40,34’W), Sidi Daoui, Secteur Grand Daoui, Bassin Ouled Abdoun.
OCP-CPSGM MA19 ( Figs 19 View FIG D-F; 21E), mandibule droite avec fragment de m2 et m1 et alvéoles antérieurs de p4 et p3; localité exacte inconnue, Secteur Grand Daoui, Bassin Ouled Abdoun.
PM22 ( Figs 9B View FIG ; 10E View FIG ), fragment de maxillaire gauche avec M3-1 (M3 en cours d’éruption); localité exacte inconnue, Secteur Grand Daoui, Bassin Ouled Abdoun. Coll. privée, moulage MNHN.
PM23 ( Figs 17 View FIG ; 21B View FIG ), mandibule droite avec fragment m3, m2-1, p4-3, et alvéoles p2 et incisive antérieure (i1); localité exacte inconnue, Secteur Grand Daoui, Bassin Ouled Abdoun. Coll. privée, moulage MNHN.
PM24 ( Figs 5 View FIG A-D; 9C; 10B), avant-crâne préservant les deux maxillaires bien conservés (non déformés) mais dont les dents sont cassées; seule m3 d. est préservée; localité exacte inconnue, Secteur Grand Daoui, Ouled Abdoun. Collection du Muséum de Lyon, ML 20269963.
MNHN PM25 ( Figs 15 View FIG A-D; 21C), mandibule droite avec m3-1, p4-3, i2 (m3 et i2); localité exacte inconnue, Secteur Grand Daoui, Bassin Ouled Abdoun.
OCP-CPSGM MA26 ( Figs 19 View FIG G-J; 21H), fragment de mandibule droite avec p3; localité RP13-4 (32°50,65’N, 6°37,76’W), Sidi Daoui, Secteur Grand Daoui, Bassin Ouled Abdoun.
PM32 ( Fig. 18 View FIG A-C), fragment de mandibule droite roulée avec m2-1, p4-3; localité exacte inconnue, Secteur Grand Daoui, Bassin Ouled Abdoun. Coll. privée, moulage MNHN.
MNHN PM38 ( Fig. 26 View FIG ), phalange médiane (pied ou main); localité inconnue, Secteur Grand Daoui?, Ouled Abdoun. Don F. Escuillié/Rhinopolis.
OCP DEK/GE 337 ( Fig. 9D View FIG ), fragment de maxillaire droit avec M3-1 et alvéoles de P4-3; localité inconnue, Secteur Grand Daoui?, Bassin Ouled Abdoun.
PM43, rostre (maxillaires d. et g.) préservant les rangées dentaires droites (M3-1, P4-2) et gauche (M3- 1, P4-2); localité inconnue, Secteur Grand Daoui?, Bassin Ouled Abdoun. Coll. privée, moulage MNHN. PM46 ( Figs 19 View FIG A-C; 21D), fragment de mandibule droite avec m2-1, P4-3; localité inconnue, Secteur Grand Daoui?, Bassin Ouled Abdoun. Coll. privée, moulage MNHN.
LOCALITÉS ET ÂGE. — Bassin des Ouled Abdoun ( Maroc), Carrières du Secteur Grand Daoui (voir Gheerbrant et al. 2003). Intercalaire couches II-I (et couche I?), Yprésien basal. Quand elles sont connues, les localités exactes du matériel décrit ici sont situées par Gheerbrant et al. (2003: fig. 3).
DIAGNOSE ÉMENDÉE. — Plus petit proboscidien connu, avec peut-être Khamsaconus (? Phosphatheriidae n. fam.).
Caractères affines des proboscidiens: incisive centrale inférieure (i1) agrandie, procline; molaires lophodontes vraies, de construction identique à Daouitherium , Numidotherium et Barytherium ; taille croissante distalement des molaires et de façon plus accusée entre M1 et M2; perte probable de i3 et (d)p1; diastème supérieur antérieur à P2 petit mais présent; orbite ouverte principalement dans le maxillaire et processus zygomatique du maxillaire développé, robuste; fosse glénoïde plane et étendue; foramen postglénoïdien en position sensiblement médiale; pars mastoidea du périotique bien développée; foramen optique en position distale proche de la fente sphénorbitaire, les deux alignés sous la crista orbito-temporalis. Phosphatherium escuilliei diffère de Khamsaconus par la taille près de deux fois plus grande, la morphologie moins bunodonte, le postentoconule moins fort et les lophes plus développés.
Phosphatherium escuilliei diffère de Numidotherium , Barytherium , Moeritherium , les deinothères et les Elephantiformes (voir ci-dessous pour Daouitherium encore mal connu), par de nombreux caractères primitifs: 1) crâne et dentaire: crâne allongé avec une partie faciale deux fois plus allongée que la partie cérébrale; rangée dentaire ne s’étendant pas au-delà du milieu de la longueur du crâne; nasal allongé, élevé et antérieur; fosses nasales en position antérieure; constriction post-orbitaire très prononcée; faible élévation de l’arrière-crâne et du pariétal; faible pneumatisation des os de la cavité crânienne; foramen hypoglosse présent; condyle mandibulaire bas et corpus mandibulaire étroit; symphyse mandibulaire courte et non soudée; 2) denture: formule dentaire primitive conservant C1, (d)P1 et probablement c1: I? /2?, C 1/1, P 4/3, M 3/3; C1 et (d)P1 bien développées; i1 modérément agrandie et non hypsodonte; diastème supérieur court en avant de P2; diastème inférieur absent ou très réduit; prémolaires inférieures simples, non molarisées, spécialement p4; ectolophe bien développé, relié à un mésostyle plus (dP4) ou moins (molaires) différencié.
Phosphatherium escuilliei diffère de tous les proboscidiens sauf de Numidotherium savagei par la petite p2 munie d’une seule racine; (d)P1 est en outre peu réduite, mais uniradiculée, antérieure et procline (caractère inconnu chez Daouitherium ).
Phosphatherium escuilliei partage avec Daouitherium rebouli plusieurs traits primitifs remarquables: diastème inférieur absent ou très réduit; formule dentaire primitive conservant c1.
Il diffère de Daouitherium rebouli par (voir Gheerbrant et al. 2002): dimensions = 35-45 % de D. rebouli ; p2 uniradiculée; prémolaires inférieures simples, notamment p4; p4 sans trace d’entolophide; molaires inférieures pourvues d’une trace variable de postentoconulide (m1-2) et dont la crête oblique est peu oblique et joint le trigonide plus labialement; différence de taille des molaires (notamment entre m1 et m2) moins marquée; condyle mandibulaire peu élevé; branche horizontale étroite.
Phosphatherium escuilliei diffère en outre de Numidotherium (caractères inconnus chez Daouitherium ) par: molaires supérieures avec une couronne plus basse et moins comprimée; parastyle plus grand; fort postentoconule de dP4; métacône plus développé sur les prémolaires; fosse sous-maxillaire plus réduite (partie antérieure); frontal simple non renforcé; fenêtre ovale (f. vestibuli) proportionnellement plus grande.
DESCRIPTION DU CRÂNE
Le nouveau matériel de Phosphatherium escuilliei comprend deux crânes (MNHN PM17, OCP DEK/GE 305) et deux avant-crânes avec les orbites (OCP-CPSGM MA12, PM24), comparés et figurés. Il permet une analyse détaillée de la morphologie crânienne et une toute première reconstitution du crâne de l’espèce.
Matériel crânien disponible
Crâne OCP DEK/GE 305 ( Figs 1 View FIG ; 2 View FIG ). Ce spécimen est presque complet, il n’en manque essentiellement que les prémaxillaires. Il est cependant déformé, avec un important écrasement latéral. La partie supérieure (région frontopariéto-occipitale) et le maxillaire gauche sont toutefois bien conservés. La rangée dentaire gauche préserve la série P3-M3, les alvéoles de P2, un court diastème et deux alvéoles antérieurs. Seul est visible le départ de l’arcade zygomatique (processus zygomatique du maxillaire). Le maxillaire droit, qui porte la série identique, se trouve décalé ventralement à partir d’une fracture située au-dessus de l’orbite. Légèrement déformé, il montre la région sous-orbitaire et une partie de l’arcade déplacée vers la face ventrale. Le décalage de cette partie du crâne est prononcé et bien visible au niveau de la fracture située à la surface supérieure du frontal, ou au niveau de la suture entre le frontal et le maxillaire. Le squamosal gauche dissocié du crâne montre le processus post-glénoïde, l’encoche du méat auditif et l’apophyse post-tympanique. Malgré les fractures et les déformations, ce spécimen permet d’estimer les dimensions et les proportions générales du crâne de l’espèce.
Crâne MNHN PM17 ( Figs 3 View FIG ; 4 View FIG ). Il s’agit d’un crâne incomplet, écrasé et légèrement gauchi longitudinalement. Les maxillaires portent les séries dentaires P3-M3 droites et P4-M3 gauches. En vue ventrale la déformation est attestée par le décalage longitudinal des rangées dentaires, des arcades, des surfaces glénoïdes, de la région de l’oreille moyenne et des condyles occipitaux. La partie antérieure manque, la partie supérieure également, le frontal et le pariétal étant détériorés. Les arcades zygomatiques sont toutefois suffisamment conservées (surtout le processus zygomatique du maxillaire) pour en apprécier la puissance et l’orientation. À l’avant, le processus zygomatique du maxillaire est très puissant (au-dessus de P4-M2) et le début de l’arcade très divergent latéralement. Ce spécimen préserve bien la région de l’oreille moyenne (périotique).
Avant-crâne PM24 ( Fig. 5 View FIG A-D). La pièce se limite à un palais portant les séries dentaires détériorées (P3 droite endommagée, M3 droite, fragment de P3 gauche et M2 gauche). La situation des alvéoles antérieurs sur les deux côtés du palais est identique à celle observée sur le spécimen OCP DEK/GE 305. Le palatin montre des foramens au niveau de la M2 qui correspondent aux foramens palatins majeurs (foramen palatinus majus) généralement situés à la suture entre le palatin et le maxillaire.
Avant-crâne CPSGM MA12 ( Fig. 5E, F View FIG ). Maxillaires avec les rangées dentaires P2-M3 gauches conservées et P2-M3 droites dont les couronnes sont détériorées. Ce spécimen donne une idée de l’importance des fosses nasales.
Reconstitution du crâne de Phosphatherium escuilliei ( Fig. 6 View FIG )
Une première reconstitution du crâne de Phosphatherium escuilliei est proposée en Figure 6 View FIG à titre d’hypothèse de travail. Elle est fondée sur les dimensions relevées sur le matériel disponible et spécialement sur les spécimens les plus complets, OCP DEK/GE 305 et MNHN PM17, après correction des déformations.
D’après ses mensurations, Phosphatherium a un crâne deux fois plus court que celui de Moeritherium . De plus, il est moins élevé dans la région occipitale et il montre une importante crête sagittale et une forte constriction postorbitaire. Les arcades, quoique robustes, sont moins massives que chez Numidotherium mais elles sont relativement plus écartées de l’axe parasagittal ( Tassy 1981). L’une des plus importantes singularités de Phosphatherium est l’extension modérée vers l’arrière de la série dentaire, le bord distal de M3 se situant à peu près à milongueur du crâne. Chez Moeritherium , l’arrière de la M3 est située aux deux tiers de la longueur du crâne et chez Numidotherium elle est encore plus en retrait. Ceci témoigne de l’architecture plus généralisée (primitive) du crâne de Phosphatherium .
Paramètres crâniens de Phosphatherium escuilliei . La longueur du crâne de Phosphatherium peut être évaluée à partir du spécimen OCP DEK/GE 305. La déformation causée par l’écrasement ne permet qu’une estimation de certains paramètres, notamment de la largeur entre les arcades. Sur le spécimen MNHN PM17, la déformation par gauchissement longitudinal a rapproché les rangées dentaires. En introduisant la correction due à l’angle de gauchissement, la distance séparant le bord lingual des dernières molaires serait au minimum de 30 mm. Sur le spécimen OCP DEK/GE 305, la même mensuration calculée après correction du décalage causée par la fracturation donne une valeur à peine plus élevée de 33 mm. D’après MNHN PM17, on estime que la distance maximum entre les bords latéraux des arcades zygomatiques serait comprise entre 100 et 120 mm, ce qui dénoterait d’un écartement relativement plus prononcé que chez Moeritherium et Numidotherium .
Vues supérieure et antérieure du crâne de Phosphatherium escuilliei
Le crâne, étroit à l’avant (OCP DEK/GE 305), s’évase en avant des orbites, et surtout à partir du foramen infra-orbitaire. La région préorbitaire est
Longueur du crâne (OCP DEK/GE 305) ≈ 170 Distance depuis la partie avant conservée (maxillaire) du crâne jusqu’à l’arrière de la M3 (OCP DEK/GE 305) 80 Longueur série P3-M3 49-50 Largeur du palais entre le bord lingual des P4 21-25 Largeur du palais entre le bord lingual de M3 25-30 Largeur maximale estimée au niveau des arcades (MNHN PM17) ≈ 100-120 Largeur maximale au niveau des apophyses post-orbitaires (OCP DEK/GE 305) 60 Diamètre de la surface nucale (ou largeur nucale) 28 Hauteur de la face occipitale (distance entre le basioccipital et la protubérance occipitale externe d’après OCP DEK/GE 305) ≈ 49 Distance entre l’extrémité de l’apophyse post-tympanique et la crête supraoccipitale 63
pratiquement aussi allongée que la partie postorbitaire et de même dimension que la partie cérébrale. Il en résulte une partie faciale pratiquement deux fois plus longue que la partie cérébrale proprement dite.
Région préorbitaire (nasale). La partie rostrale est la mieux documentée par le spécimen OCP DEK/GE 305. Les prémaxillaires et les nasaux sont encore inconnus (cassés sur OCP DEK/GE 305). La configuration des maxillaires sur OCP DEK/GE 305 permet néanmoins de situer le nasal en avant des orbites et très haut par rapport au plan dentaire comme chez Moeritherium et Numidotherium . Les maxillaires se développent en effet très haut (OCP DEK/GE 305, face gauche) en avant des orbites (processus frontalis), comme chez Moeritherium et Numidotherium , mais ils s’étendent sensiblement plus loin vers l’avant. Par suite du grand développement antérieur du maxillaire, il n’y avait pas de contact entre le frontal et le prémaxillaire. De plus, ce développement du maxillaire suggère que le processus dorsal du prémaxillaire n’est pas développé ( Fig. 6C View FIG ). Corrélativement, le nasal s’étendait probablement aussi nettement plus loin en avant que chez Moeritherium . On peut ainsi présumer un long contact entre le maxillaire et le nasal, par différence avec celui beaucoup plus court de Moeritherium . En outre, cela indique que les fosses nasales étaient en position avancée, et donc l’absence de trompe dont le développement est liée au recul des fosses nasales au-dessus des orbites, voire plus en arrière. Cette région est ainsi primitive, à l’instar de ce que l’on observe chez Moeritherium et Numidotherium où la position des fosses nasales est connue. Le museau de Phosphatherium est toutefois plus primitif que celui de Moeritherium et de Numidotherium dans l’extension antérodorsale du maxillaire et l’absence de processus dorsal du prémaxillaire en direction frontale. Comme le crâne de Moeritherium est bas et long et celui de Numidotherium est haut et court, il est manifeste que le degré de transformation des fosses nasales (et l’état plésiomorphe de Phosphatherium ) est indépendant des proportions du crâne.
Le museau était relativement étroit, mais n’était pas effilé d’après l’orientation des maxillaires et leur largeur (prise au niveau de l’alvéole de la canine de OCP DEK/GE 305). Les fosses nasales sont grandes (cavités nasales larges et assez hautes sur CPSGM MA12: Fig. 5 View FIG ), mais sans élargissement comparable à celui connu chez Moeritherium et de Numidotherium . Il reste que le contour des fosses nasales nous est inconnu. On peut néanmoins reconstituer la région ( Fig. 6A View FIG ).
MNHN PM17, dont le rostre est cassé, laisse voir le septum nasal (septum nasi) qui forme une lame verticale très mince. L’épaisseur de l’os dans la zone de suture maxillaire-prémaxillaire et la finesse de celle qui correspond au contact avec le nasal (région ethmoïdienne) permettent de penser que les fosses nasales montraient chez Phosphatherium la disposition euthérienne plésiomorphe, peut-être un peu plus élargies. C’est pourquoi on peut estimer que les prémaxillaires, puissants mais courts, étaient associés à des nasaux minces et allongés. La réduction latérale des nasaux qui ne bordent pas l’ouverture nasale, proposée ici de façon conjecturale dans la reconstitution ( Fig. 6A View FIG ), représente une première étape vers la disposition illustrée par Moeritherium et les autres proboscidiens.
Région post-orbitaire. En arrière de l’orbite le processus post-orbitaire du frontal, qui se traduit par un gonflement anguleux distalement et caréné vers le bas, est plus développé que chez Moeritherium . La constriction post-orbitaire très prononcée confère au crâne de Phosphatherium un aspect très différent de celui, tubulaire, de Moeritherium ( Tassy 1981) ou de celui, plus massif, de Numidotherium ( Mahboubi et al. 1986) . Ces frontaux s’étendent jusqu’à environ 2 cm audelà des orbites (OCP DEK/GE 305) et sont beaucoup plus courts et dilatés latéralement (non tubulaires) que chez Moeritherium . Le rétrécissement post-orbitaire est maximum au niveau de la suture avec le pariétal.
Les crêtes temporales (linea temporalis) se détachent des processus post-orbitaires et forment d’abord un demi-cercle régulier et sont faiblement marquées à ce niveau ( Fig. 1B View FIG ). Elles se rejoignent à environ 3 cm en arrière de la suture frontal-pariétal – beaucoup plus en arrière que chez Moeritherium (arrière des frontaux) – pour former une crête sagittale (crista sagittalis externa) prononcée et élevée ( Figs 1B View FIG ; 2A View FIG ). Malgré l’écrasement du spécimen OCP DEK/GE 305, surtout marqué du côté gauche, on constate que la cavité cérébrale proprement dite (capsule céphalique) était globuleuse, d’aspect sphéroïde, et de volume relativement réduit. À l’arrière, la crête sagittale relie de puissantes crêtes nucales (crista nuchae) très saillantes latéralement; celles-ci limitent un occipital de forme circulaire, planéiforme, mais légèrement déprimé ( Fig. 2B View FIG ). Les parois latérales de la cavité cérébrale sont également très déprimées en avant des crêtes nucales, de part et d’autre de la crête sagittale.
Le départ du processus zygomatique du maxillaire, développé au-dessus de la série P3-M2, est très puissant et très divergent (MNHN PM17 et OCP-CPSGM MA12) ( Figs 3 View FIG ; 5D View FIG ). Le processus zygomatique du squamosal, également très divergent latéralement, est épais, horizontal et pratiquement orthogonal à l’axe crânien ( Fig. 3 View FIG ), une configuration de téthythère.
Vue latérale du crâne de Phosphatherium escuilliei La reconstitution ( Fig. 6 View FIG ) montre une face relativement haute: la hauteur du maxillaire devant le foramen infra-orbitaire est sans équivoque, même si l’avant manque. En l’absence des prémaxillaires, il n’est pas possible de vérifier s’il y avait des signes de spécialisation de la denture supérieure antérieure. Des indices d’un possible renforcement de l’une des incisives supérieures sont le léger élargissement du museau en avant du foramen infra-orbitaire et la présence d’une légère dépression du maxillaire au-dessus de P2 et (d)P1, également décrite par Matsumoto (1923) chez Moeritherium comme la fosse infra-orbitaire (= fossa canina). C’est aussi en accord avec la taille notable de (d)P1 et C1 d’après les alvéoles de OCP DEK/GE 305.
La vue latérale ( Fig. 1A View FIG ) met en évidence la position probablement très haute du nasal au-dessus du plan dentaire sur OCP DEK/GE 305. Le bord antérieur de l’orbite se situe au niveau de l’avant de P4. Globalement l’orbite s’étend mésialement à l’aplomb du couple P4-P3, son bord inférieur étant distant d’environ 18 mm du bord alvéolaire de cette dernière dent. Cela correspond à la disposition dérivée des Tethytheria. Chez Moeritherium , Numidotherium et Deinotherium , l’orbite est située un peu plus en avant, dans une morphologie plus avancée ( Court 1995: caractère 2). Chez Moeritherium , l’avancée de l’orbite est la plus poussée des proboscidiens primitifs. Le lacrymal est mal distinct sur le bord antérieur de l’orbite de Phosphatherium escuilliei , mais le foramen lacrymal bien visible (OCP DEK/GE 305, MNHN PM24) étaye sa présence. C’est un trait primitif notable comparativement à Moeritherium où son absence est autapomorphique ( Tassy 1981). Le foramen infra-orbitaire (foramen infra-orbitale), de grande taille, est situé pratiquement au départ de l’arcade, c’est-à-dire à l’aplomb de la limite de P3-P2, et à environ 7 mm du bord alvéolaire de cette dent (MNHN PM17, OCP DEK/GE 305, PM24). Il n’est pas exactement sous l’orbite, mais légèrement plus antérieur, à environ 5 mm de celle-ci sur OCP DEK/GE 305 ( Fig. 1A View FIG ). Le canal infra-orbitaire est toutefois court. Il débouche dans l’orbite sous le foramen lacrymal par une large ouverture. Le foramen infra-orbitaire est prolongé vers l’avant par une dépression subhorizontale qui correspond à la fosse infraorbitaire de Moeritherium . Cette fosse est la zone d’insertion du muscle levator alae nasi. Avec le grand foramen infra-orbitaire et le maxillaire élevé, cela indique un museau et une lèvre supérieure bien développés et relativement mobiles (lèvre préhensile). C’est probablement une morphologie de téthythères.
Phosphatherium est moins dérivé que Moeritherium où le foramen infra-orbitaire est, comme l’orbite, très antérieur, au-dessus de P2. En raison de l’écrasement (OCP DEK/GE 305) ou du mauvais état des spécimens (PM24), il n’est pas possible de déterminer les proportions du maxillaire et du frontal participant à la fosse orbitotemporale. Le processus zygomatique du maxillaire, étiré longitudinalement et très étendu se détache au niveau de P2 et s’étend jusqu’à la limite M2-M3. Il est massif, épais, anguleux à l’avant et surplombe une fosse sous-maxillaire plus (MNHN PM17) ou moins (OCP-CPSGM MA12, PM24, Fig. 5 View FIG C-E) marquée. Les différents spécimens montrent que cette région est sujette à d’importantes variations, l’importance de cette fosse étant apparemment liée à la robustesse du processus zygomatique (PM24). Ces différences traduisent un probable dimorphisme sexuel ( Mahboubi et al. 1986). Le renforcement antérieur du processus zygomatique du maxillaire juste en arrière du foramen infra-orbitaire et sous le bord inférieur de l’orbite évoque plus la configuration connue chez Moeritherium que celle de Numidotherium . Chez celui-ci l’arcade est plus massive et la fosse sous-maxillaire importante et beaucoup plus profonde. Le foramen infraorbitaire est relativement plus petit chez Numidotherium que chez Moeritherium . Sur MNHN PM17, le bord supérieur du processus zygomatique du maxillaire forme une surface concave étendue transversalement et interrompue brutalement vers l’arrière à hauteur du bord distal de la M2: il n’y a pas de tuber maxillae. Plus en arrière et plus bas, le maxillaire est toutefois un peu renflé postérieurement (convexe) au-dessus de M3.
Le bord inférieur de l’orbite est formé surtout par le maxillaire et une petite partie du jugal qui s’étend jusqu’au-dessus de M1 (MNHN PM17); cet os apparaît dans la partie distale de l’orbite sous forme d’une écaille verticale sur la partie supérieure du processus zygomatique du maxillaire (MNHN PM17, PM24). Ce retrait du jugal est une des synapomorphies majeures de Proboscidea de Phosphatherium escuilliei . Sur OCP DEK/GE 305 le jugal, conservé du côté droit, forme une lame très comprimée latéralement ( Fig. 1B View FIG ). Il n’y avait pas de processus postorbitaire du jugal et probablement pas d’apophyse inférieure au départ du maxillaire comme chez Numidotherium au-dessus de M2. Chez les autres genres apparentés, le jugal ne présente pas de processus post-orbitaire. La reconstitution d’après OCP DEK/GE 305 illustrée Figure 6 View FIG montre que le jugal s’élève progressivement (environ 35-40° par rapport au plan occlusal) vers l’arrière sur sa plus grande longueur (les deux tiers antérieurs) et il s’infléchit brutalement vers le bas à la jonction avec le squamosal, dans une allure générale tout à fait similaire à Numidotherium koholense ; l’arcade s’élève cependant beaucoup moins haut que Numidotherium koholense chez lequel cela est lié à un arrière-crâne élevé. La suture jugal-squamosal n’est pas visible et l’extension distale du jugal ne peut pas être observée.
Le pariétal n’est pas en contact avec l’alisphénoïde. Le contact est en effet interrompu par une courte suture entre le frontal et le squamosal, selon une disposition dérivée connue chez les proboscidiens ( Tassy 1981). Le processus postorbitaire du frontal forme un petit bourrelet triangulaire prolongé par une petite crête d’orientation ventro-distale qui correspond à la crista orbito-temporalis observée chez Moeritherium ( Tassy 1981) . Le foramen ethmoïdien s’ouvre dans l’axe de cette crête dans la fosse orbitotemporale à environ 1 cm de l’ouverture antérieure du canal de l’alisphénoïde. Il apparaît même surmonté par un pli osseux dans le prolongement de cette crête. Comparativement à la rangée dentaire, la suture fronto-pariétale est beaucoup plus reculée que chez Moeritherium où elle est située au-dessus de M2. La base du crâne est nettement moins redressée que chez Numidotherium et même que chez Moeritherium qui a pourtant un crâne bas comme celui de Phosphatherium . Le trou auditif externe n’est pas fermé ventralement ( Fig. 1C View FIG ) et est bordé mésialement par une apophyse post-glénoïde mousse et distalement par l’apophyse post-tympanique étroitement accolée à l’apophyse paroccipitale. Le trou optique est situé à proximité (à sa marge antéro-supérieure) de la grande fente en demilune pour l’ouverture antérieure du canal de l’alisphénoïde, et probablement pour la fente sphénorbitaire (et le trou rond?; celui-ci et le foramen sphénorbitaire restent toutefois invisibles). Il est impossible de voir les sutures entre palatin et alisphénoïde mais l’étendue antéropostérieure de la région située entre la M3 et l’ouverture antérieure du canal de l’alisphénoïde pourrait indiquer que la branche ascendante du palatin est développée, selon une morphologie plésiomorphe.
Le toit crânien (pariétal) au-dessus de la cavité cérébrale a un profil supérieur légèrement convexe vers l’arrière et ne montre pas une légère élévation progressive comme chez Moeritherium . Sur OCP DEK/GE 305, la boite crânienne (pariétal) détériorée à l’arrière montre des os légèrement pneumatisés ( Figs 1A View FIG ; 2D View FIG ). Des sinus sont également visibles sur le squamosal droit de MNHN PM17, au départ du processus zygomatique cassé. Le squamosal est en outre percé à l’arrière de trous vasculaires ( Figs 3C View FIG ; 4D View FIG ), décrits comme les foramens accessoires du système du canal temporal chez Moeritherium ( Tassy 1981) .
Face postérieure (ou face nucale) du crâne de Phosphatherium escuilliei
Sur le crâne MNHN PM17, écrasé et incomplet dans sa partie supérieure, le pariétal est absent. Sont toutefois conservés, le basioccipital et les condyles de part et d’autre du foramen magnum.
D’après OCP DEKGE 305, l’occipital se présente sous la forme d’une surface pratiquement circulaire, planéiforme, mais légèrement déprimée ( Fig. 2B View FIG ). Il n’y a pas de crête médiane destinée à l’insertion du tendon nucal. Les crêtes nucales étant très saillantes, les bords latéraux de l’occipital sont fortement carénés. La partie basilaire de l’occipital est cassée et il n’est pas possible de déterminer la distance séparant le foramen magnum de la protubérance occipitale; une estimation est cependant proposée (voir Tableau 1). Les condyles occipitaux, conservés sur MNHN PM17, mais en mauvais état, délimitent un foramen magnum ovoïde et transverse. Sur OCP DEK/GE 305 l’apophyse post-tympanique droite, qui subsiste, est saillante latéralement comme c’est le cas chez Moeritherium et Numidotherium alors qu’elle est réduite chez Phiomia et Palaeomastodon . On retiendra également que l’élévation du crâne est moins importante que chez Moeritherium et a fortiori que chez Numidotherium . Le processus zygomatique du squamosal, qui est très distal et orthogonal à l’axe crânien suivant la disposition téthythère, est remarquablement robuste.
L’apophyse mastoïde du pétreux semble absente à l’angle postéro-externe entre le squamosal et l’exoccipital, mais cette région est indistincte sur le matériel disponible. L’absence d’apophyse mastoïde postéro-latérale ou « amastoïdie » est une disposition classique de paenongulé (i.e. Hyracoidea + Tethytheria; voir Gheerbrant et al. 2005).
Face palatine ou ventrale du crâne de Phosphatherium escuilliei ( Figs 1A View FIG ; 3A View FIG ; 5B View FIG )
Les séries dentaires sont légèrement divergentes latéralement et courbées. On note un très léger évasement du museau au niveau de l’alvéole de la (d)P1, mais la denture antérieure (incisives) reste inconnue. La partie antérieure du palais montre un large sillon longitudinal étendu le long de P3 et C1 et délimité lingualement par une crête bien marquée sur OCP DEK/GE 305 ( Figs 1A View FIG ; 9A View FIG ). Ce sillon est également présent chez Moeritherium et Prorastomus ( Savage et al. 1994: 434) . Sur l’avant-crâne PM24, le palatin montre au niveau de la M2 les deux foramens palatins majeurs (foramen palatinus majus), situés à la suture palatin-maxillaire ( Fig. 5A, B View FIG ). La limite du palatin est située au niveau de celle de M2 et M3. Plus en retrait, les processus ptérygoïdes (processus pterygoideus), bien développés, allongés, et peu divergents, limitent une fosse ptérygoïdienne (fossa pterygoidea) profonde mais étroite ( Figs 3A View FIG ; 4A View FIG ; 5A, B View FIG ). Chez Moeritherium , ces apophyses sont plus courtes et nettement plus divergentes vers l’arrière. Latéralement et juste en arrière de ces apophyses ptérygoïdes se trouve le foramen alaire caudal (foramen alare posterius). Le canal de l’alisphénoïde est bien visible sur la face gauche OCP DEK/GE 305; l’ouverture antérieure pour le canal alisphénoïde et la fente sphénorbitaire est grande, en forme de demi-lune, et l’ouverture postérieure du canal est petite et arrondie. Celle-ci est à l’origine d’un sillon distal ou canal alaire (canalis alaris), long de 2 cm, et destiné au passage de l’artère maxillaire. Il joint distalement le foramen ovale, à proximité du foramen post-glénoïdien (MNHN PM17). D’après le spécimen OCP DEK/GE 305, le basisphénoïde s’étend sur 1 cm au-delà des processus ptérygoïdes. La boîte crânienne, ouverte sur cet échantillon, ne permet pas d’observation particulière.
Latéralement les arcades zygomatiques se détachent au niveau de la M2 alors que la fosse sousmaxillaire est présente, mais modeste. Le spécimen MNHN PM17 montre de nombreux détails sur la forme des arcades. Celles-ci, extrêmement robustes, sont très divergentes latéralement et, à l’arrière, implantées très en retrait. La cavité glénoïde, bien conservée (e.g., squamosal gauche isolé de OCP DEK/GE 305, Fig. 1C View FIG ), repose sur un pilier très robuste formé par le squamosal (trait de proboscidien). Elle forme une vaste surface planéiforme, à peine concave, et oblique médio-ventralement. Son grand développement rappelle la disposition proboscidienne (comparativement à celle réduite des siréniens). L’apophyse post-glénoïde est petite mais robuste. Elle est matérialisée médio-distalement par le soulèvement en lèvre du bord de la surface articulaire. Un important foramen post-glénoïdien (f. rétroarticulaire) est présent sur le flanc médiodistal de la cavité glénoïde, à sa mi-hauteur. La position médiale de ce foramen peut être interprétée comme un état intermédiaire en direction de l’orifice appelé orifice ventral du canal temporal connu chez Moeritherium et les éléphantiformes (le f. post-glénoïdien appartient au système vasculaire du canal temporal). Cela suggère que le foramen post-glénoïdien médial de Phosphatherium est une synapomorphie de proboscidien. Ce foramen ventral du canal temporal est absent chez les siréniens (incl. Prorastomus ) et présent chez les desmostyliens, mais son homologie incertaine chez ces derniers.
Entre les apophyses post-glénoïde et posttympanique du squamosal, se creuse la profonde encoche du méat auditif qui reste ouverte ventralement, une disposition plésiomorphe. Les apophyses post-tympaniques sont massives et saillantes comme chez Moeritherium , alors qu’elles sont relativement plus réduites chez Phiomia et Palaeomastodon . Elles jouxtent l’apophyse paroccipitale.
Le tympanique – déduit de la taille et de la forme du périotique de PM17 – est relativement réduit, comme chez Moeritherium , avec peut-être une extension latérale bordée par le petit ressaut du squamosal (PM17) qui rappelle les téthythères ( Prorastomus ). Sa reconstitution est donnée dans la Figure 6B View FIG à titre hypothétique.
Région de l’oreille moyenne du crâne de Phosphatherium escuilliei ( Figs 7 View FIG ; 8 View FIG )
Les pétreux (os périotique) droit et gauche sont bien conservés sur MNHN PM17, seule la paroi latéro-ventrale est brisée de telle sorte qu’une partie du labyrinthe (limaçon) est visible. Sur le crâne OCP DEK/GE 305, le périotique droit est conservé. L’os, très fragile, est endommagé dans sa partie postérieure et a été dégagé autant que possible. La face droite enchâssée entre alisphénoïde, squamosal et exoccipital contient un peu de gangue masquant en partie le foramen ovale. Le périotique a une allure générale ovoïde, légèrement plus longue que haute. Son orientation est longitudinale comme chez Numidotherium et à la différence de Moeritherium où il est dorso-ventral. Le périotique droit est visible sur la face dorsale (cérébrale) sur MNHN PM17 ( Fig. 7A View FIG ). La fosse floculaire (fossa subarcuata) n’est pas visible, probablement encore encroûtée dans le sédiment. Celle-ci est en revanche distincte sur OCP DEK/GE 305 (périotique droit) ( Fig. 8B View FIG ), où elle est grande et profonde. Le trou auditif interne est grand (3 mm), elliptique, étiré antéro- postérieurement. Les orifices respectifs des nerfs VII et VIII (facial et acoustique) sont visibles sur MNHN PM17, mais encroûtés de sédiment sur OCP DEK/GE 305. Sur MNHN PM17, le foramen endolymphatique, dorsal a la forme d’une fente. Sur le crâne OCP DEK/GE 305, la partie postérieure du périotique est brisée juste au niveau du foramen endolymphatique qui n’est pas visible. Le canal cochléaire (cochleae canaliculus) ou aqueduc du limaçon (aquaeductus cochleae) est visible, en vue dorsale sur MNHN PM17, en position basse, sur le bord postérieur du périotique.
En vue ventrale, sur MNHN PM17 le périotique droit apparaît séparé du basioccipital et montre le flanc médial ( Fig. 7B View FIG ). On y distingue, médialement, le sillon pour la veine jugulaire, outre le canal cochléaire. Sur MNHN PM17, la description détaillée concerne toutefois principalement le pétreux gauche, mieux visible et illustré dans la Figure 8C, D View FIG . Le pétreux gauche est légèrement détérioré dans sa partie mésiale. Le trou déchiré moyen, en principe médial, n’est pas visible. Latéralement à la cassure qui laisse apparaître la lame spiralée osseuse de la cochlée (limaçon), se situe la fenêtre ovale (fenestra vestibuli) qui servait d’appui au stapes. Elle a une forme arrondie et une taille relativement grande. D’après Court & Jaeger (1991), Numidotherium avait une fenêtre ovale de très petite taille. Plus latéralement encore se distingue un sillon bien marqué, légèrement courbe, long de 9 mm: il s’agit du canal de Fallope qui s’étend vers l’avant jusqu’à un pont osseux (aqueduc de Fallope) surplombant mésialement le foramen ovale. La ride en relief du promontoire bordant distalement la surface cassée de la cochlée est suivie d’une légère dépression transverse un peu oblique vers l’avant. Celle-ci s’étend latéralement jusqu’à un petit foramen qui est la fenêtre ronde (fenestra cochleae) et sur laquelle s’appuyait la membrane tympanique secondaire. Cette fenêtre a une orientation verticale et distale. Latéralement à cette dépression, et plus distalement, dans le prolongement du canal de Fallope, se trouve un orifice beaucoup plus grand que les précédents en forme de cône inversé: le foramen stylomastoïdien (nerf VII). Cette ouverture est située au niveau de l’apophyse post-tympanique. À l’arrière, la surface de la cochlée montre près du basioccipital un orifice, au moins de la taille de la fenêtre ovale, qui correspond au passage du canal cochléaire (aquaeductus cochleae) destiné à faire communiquer le liquide périlymphatique de la cochlée avec le domaine sous arachnoïdien. Il s’agit là d’un caractère primitif important, présent aussi d’après Court & Jaeger (1991) chez Numidotherium , mais absent et perdu indépendamment chez les proboscidiens et les siréniens. Le trou déchiré postérieur destiné au nerf glossopharyngien (IX) est situé juste en arrière du pétreux. À ce niveau, tout près de la partie basilaire de l’occipital mais plus distal et à environ 8 mm du canal cochléaire, se trouve l’ouverture du foramen hypoglosse (f. condylien). Ce foramen est double, comme par exemple chez les phénacodontes ( Thewissen 1990: fig. 53 b): il comprend deux orifices dont l’un correspond au passage du nerf XII et l’autre probablement à des vaisseaux sanguins. Sur OCP DEK/GE 305, grâce à la cassure du squamosal, la partie postérieure du périotique, correspondant à la pars mastoidea, est visible mais partiellement détruite ( Fig. 8 View FIG ). Néanmoins, on peut conclure que celleci était largement développée (d’environ un tiers plus grande que la pars cochlearis), un trait qui rappelle les proboscidiens plus avancés. Le bombement central correspond à la partie cochléaire (pars cochlearis) de la capsule auditive ( Fig. 8A View FIG ). En contrebas le promontoire (promontorium) sépare deux foramens qui s’ouvrent ventralement: la fenêtre ronde (fenestra cochleae), étirée et ouverte vers l’arrière, et le canal cochléaire (aquaeductus cochleae) plus médial et plus en arrière, légèrement plus petit (et dont le contour exact est difficile à préciser en raison de la médiocre préservation de l’os). Sur la face latérale, on devine l’emplacement de la fenêtre ovale (fenestra vestibuli) sur OCP DEK/GE 305.
La vue dorsale du périotique droit de OCP DEK/GE 305 ( Fig. 8B View FIG ) suggère aussi que la pars mastoidea est agrandie selon une disposition vraisemblablement proboscidienne, mais sans exposition postéro-latérale (amastoïdie). De fait, le périotique de Phosphatherium évoque nettement celui de Numidotherium décrit par Court & Jaeger (1991), en dehors de la taille absolue puisque ce dernier est beaucoup plus grand. En effet, dans les deux cas, le périotique est muni d’une pars mastoidea développée, associée à la morphologie généralisée du périotique avec trois foramens: fenêtre ovale pour le stapes, fenêtre ronde et canal cochléaire. Ce dernier point est le caractère le plus remarquable puisqu’il s’agit de la persistance de la disposition thérienne chez un téthythère. Chez les autres proboscidiens connus, y compris Moeritherium , le périotique est éléphantin avec la présence d’un seul foramen ventral, le foramen périlymphatique (ductus perilymphaticus) qui persiste au cours de son développement et ne se subdivise pas en fenêtre ronde et canal cochléaire ( Fischer 1990). Ce trait dérivé, qui correspond à une paedomorphose, n’existe parmi les Theria, que chez les siréniens autres que Prorastomus ainsi que chez Arsinoitherium ( Court 1990) : sa distribution prouve sa nature homoplastique chez les Tethytheria.
DESCRIPTION DE LA DENTURE
Denture supérieure (nouveaux éléments)
Nous donnons ici de nouveaux éléments sur la denture supérieure de P. escuilliei , en complément de la description initiale présentée par Gheerbrant et al. (1996, 1998).
Molaires supérieures ( Figs 9-11 View FIG View FIG View FIG ).
M1 et M2: ces dents sont décrites par Gheerbrant et al. (1996, 1998).
M3: la dernière molaire supérieure est illustrée par quatre spécimens (MNHN PM17, OCP DEK/GE 305, PM24 et le moulage PM22) ( Figs 9-11 View FIG View FIG View FIG ). Elle se caractérise par sa grande taille (1,4-1,5 fois les dimensions de M2) et son allure asymétrique. Les cuspides distales et le métalophe sont plus réduits que les cuspides mésiales et le protolophe et l’ensemble forme un lobe distal plus étroit que lobe antérieur. Le flanc labial de la dent est sensiblement oblique par rapport à l’axe mésio-distal et pratiquement en continuité avec le flanc distal. Ils épousent étroitement la courbure du maxillaire en arrière du processus de l’arcade zygomatique. Il existe un petit cingulum labial plus (PM24, MNHN PM17) ou moins (OCP DEK/GE 305, PM22) bien développé. Il se poursuit distalement par un cingulum postérieur jusqu’à l’arrière de la dent où il se renfle légèrement et joint la distocrista.
Le protolophe est fortement courbé, d’allure convexe vers l’avant en vue occlusale. Le métalophe est plus oblique distalement. Sur OCP DEK/GE 305, la partie labiale des lophes (flanc lingual des paracône et métacône) est singulièrement peu différenciée ( Figs 9A View FIG ; 10D View FIG ). Le cingulum mésial est particulièrement bien développé, étendu depuis le parastyle jusqu’à l’avant de l’apex du protocône. Le protocône est la cuspide la plus volumineuse et il est sensiblement plus gros que l’hypocône. Postparacrista et postmétacrista sont encore bien développées. Par contre la postprotocrista est absente. La prémétacrista est faible. Le mésostyle est absent sur la plupart des M3, sauf sur MNHN PM17, alors qu’il est généralement renflé sur M1 et M2. Les conules sont absents, comme sur les autres molaires. L’entoflexus est plus ou moins creusé. MNHN PM17 se singularise également par la présence d’un cingulum lingual (légères traces également sur PM24).
Il y a trois ou quatre racines: deux racines mésiales sous le protocône et sous le paracône, une racine distale sous le métacône dilatée distolingualement. La racine du protocône semble en cours de subdivision sur M3 (cf. MNHN PM17, OCP DEK/GE 337; Fig. 9D View FIG ), plus encore que sur M1 et M2 ( Gheerbrant et al. 1998: 256). Plusieurs spécimens, dont MNHN PM17 et PM24, montrent sur M3 une racine sous l’hypocône en plus de celle du protocône ( Fig. 10D View FIG ).
Variabilité morphologique des molaires supérieures (M1-3): le nouveau matériel permet d’identifier quelques traits morphologiques des molaires faisant l’objet d’une variation. Ce sont essentiellement:
– le développement des lophes: OCP DEK/GE 305 montre des lophes peu développés et notamment un métalophe incomplet ne s’étendant pas sur le flanc lingual du métacône jusqu’à son apex ( Figs 9A View FIG ; 10D View FIG ); il en résulte une allure générale bunodonte plus marquée des molaires;
– le flanc lingual des protocône et hypocône est plus ou moins incliné; sur OCP DEK/GE 305, il est sensiblement moins redressé et plus allongé, et donne l’impression d’une légère hypsodontie unilatérale linguale;
– la présence d’un cingulum lingual sur MNHN PM17 (surtout sur M3), absent sur les autres spécimens; celui-ci se renfle en une légère cuspule au niveau de l’entoflexus;
– le développement du mésostyle qui peut être réduit (MNHN PM2, OCP-CPSGM MA12, PM22, PM24) ou présent (MNHN PM1, OCP DEK/ GE 305), voire important (MNHN PM17);
– le développement du cingulum labial, notamment sous le paracône, plus sensible sur MNHN PM17, OCP DEK/GE 305, PM24;
– la présence d’une racine sous l’hypocône de M3.
Prémolaires supérieures.
P2: cette dent n’est documentée que par les spécimens OCP-CPSGM MA12 et PM43 (moulage) ( Fig. 10C View FIG ). Elle n’a pas de protocône, ni de racine linguale. La couronne est allongée mésiodistalement et comprimée labio-lingualement. En vue occlusale le contour est étroit à l’avant et plus large à l’arrière. L’allure générale est relativement acérée avec une cuspide principale haute flanquée de deux crêtes mésio-distales. La crête distale est la plus longue et la mieux différenciée. Une petite cuspule est renflée à l’avant de la couronne, audessus de la racine antérieure. Une petite cuspule crestiforme se renfle également à l’arrière de la cuspide principale sur la crête distale (à sa milongueur). Le flanc disto-lingual est légèrement déprimé. Il existe un petit cingulum à l’arrière de la dent, du côté lingual. La dent est étroitement imbriquée dans la p3, contre son flanc antérieur.
Variabilité des prémolaires supérieures: elle porte principalement sur le développement transversal plus (OCP DEK/GE 305) ou moins (OCP- CPSGM MA12) grand, et sur le métacône plus (MNHN PM2) ou moins différencié.
Denture antérieure. Les dents antérieures à P2 sont inconnues. Elles ne sont représentées dans le matériel disponible que par deux alvéoles préservés sur OCP DEK/GE 305 et séparées de P2 par un petit diastème comme sur l’holotype (dimensions ci-dessous): Figs 5B View FIG ; 9A View FIG ; 10A, C, D View FIG . L’extension de ce diastème est un peu moins gran- de que chez Moeritherium . D’après les alvéoles, ces deux dents étaient de taille moyenne, non réduite, la plus antérieure étant la plus grande. Elles étaient nettement proclives et légèrement comprimées labio-lingualement. Elles sont séparées l’une de l’autre par un petit diastème, bien plus court (2,8 mm) que celui situé immédiatement en avant de P2. L’interprétation du rang dentaire de ces dents antérieures nécessite discussion.
Une première hypothèse, la plus simple et économique, est de les considérer homologues de la C1 et la I3 de Numidotherium koholense et Moeritherium , comme le suggèrent leur taille et leur position relative identiques, notamment par rapport au diastème antérieur à P2. Leur allure procline évoque aussi des dents antérieures. Cela est en accord avec l’absence de P1 chez les proboscidiens connus jusqu’ici. Gheerbrant et al. (1998)
A ont ainsi interprété le premier alvéole conservé en avant de p2 sur l’holotype de Phosphatherium escuilliei comme celui de la canine supérieure. Cette hypothèse suppose qu’une partie du prémaxillaire est conservée sur OCP DEK/GE 305, alors qu’aucune suture osseuse n’est distincte. Ces sutures sont toutefois mal visibles de façon générale sur le matériel de Phosphatherium , et spécialement sur le spécimen OCP DEK/GE 305. Dans cette hypothèse la formule dentaire supérieure connue de Phosphatherium est I?, C1, P2-4, M1-3. La seconde hypothèse suppose l’absence effective de prémaxillaire et d’incisives sur OCP DEK/GE 305, comme dans l’ensemble du matériel connu. Le spécimen OCP DEK/GE 305 montre une allure remarquablement symétrique des os droit et gauche à l’extrémité antérieure brisée du rostre. Cela suggère que le rostre a été cassé au niveau précis de la suture prémaxillaire-maxillaire. La suture osseuse représente en effet un point de fragilité particulier et les principales cassures observées chez OCP DEK/GE 305 se font de fait à l’emplacement de sutures, entre le squamosal et le pariétal, entre les deux frontaux et les deux maxillaires, etc. L’allure très similaire des bords antérieurs droit et gauche cassés du rostre, qui recoupent notamment de façon singulière le bord antérieur de l’alvéole antérieur des deux côtés, suggère ainsi que le prémaxillaire est manquant et que l’on a affaire au seul maxillaire. Jaeger (in Mahboubi et al. 1986: 27) signale que chez Numidotherium koholense la canine est située « immédiatement derrière la suture prémaxillairemaxillaire », ce qui correspond à la position du plan de cassure observé sur OCP DEK/GE 305. La même situation est observée chez les siréniens d’après Andrews (1906). La sculpture striée de l’os à la surface du plan de cassure en avant de l’alvéole antérieur accrédite aussi qu’il s’agit de la suture prémaxillaire-maxillaire. Cela exclut la présence d’incisives sur le spécimen et les deux alvéoles antérieurs observés ne peuvent ainsi correspondre qu’à une canine et une (d)P1. La formule dentaire supérieure impliquée par cette hypothèse est ainsi I3, C1, P1-4, M1-3, en admettant que le nombre d’incisives n’est pas réduit comme chez Numidotherium koholense et Moeritherium . Dans cette hypothèse, la présence de la (d)P1 et sa taille notable sont remarquables. On doit noter que la (d)P1 ainsi identifiée – par sa position antérieure (notamment par rapport au diastème), sa taille relativement importante et son allure procline – s’associe fonctionnellement plus à la denture antérieure, canines et incisives, qu’à la denture jugale. Il semble exister là une spécialisation particulière de la denture antérieure de Phosphatherium .
En définitive nous favorisons au moins provisoirement la rétention d’une P1 chez Phosphatherium (contra Gheerbrant et al. 1998). Cela en fait le seul proboscidien connu ayant conservé la formule dentaire supérieure primitive des euthériens (en admettant la présence de trois incisives supérieures comme chez Numidotherium koholense et Moeritherium ).
Le diastème qui sépare les dents antérieures fait l’objet d’une nette variabilité dans son développement. Il est notablement long sur OCP-CPSGM MA 12 et très court sur OCP DEK/GE 305 et PM24 (voir dimensions).
Dimensions (mm). Voir Tableau 2.
Les Figures 12 View FIG et 13 View FIG illustrent la dispersion et l’étendue de variation des dimensions des dents jugales supérieures de Phosphatherium escuilliei .
Denture inférieure
Une reconstitution de la denture inférieure de P. e s c u i l l i e i e s t p r o p o s é d a n s l a F i g u r e 1 4. L’essentiel de cette denture est connu, à l’exception de la p2 et d’une dent antérieure interprétée comme la canine. Au total, la denture définitive comprend neuf dents sur chaque dentaire.
Molaires inférieures. Caractères généraux des molaires inférieures: comme les molaires supérieures, les molaires inférieures se caractérisent par une taille sensiblement croissante de m1 à m3 et une morphologie lophodonte vraie. Deux lophes continus et relativement acérés sont développés entre d’une part le protoconide et le métaconide (protolophide) et d’autre part l’entoconide et l’hypoconide (entolophide = hypolophide). Ces lophes sont parallèles et bien transversaux. Ils sont très légèrement convexes distalement en vue occlusale. Le protolophide est un peu moins long que l’entolophide. La couronne apparaît haute en vue latérale, probablement en rapport avec la spécialisation lophodonte. Cela concerne particulièrement le talonide, qui reste cependant un peu plus bas que le trigonide.
Quatre cuspides principales sont présentes, protoconide, métaconide, hypoconide et entoconide. Elles sont crestiformes, mais leur flanc interne est convexe et forme à l’apex une légère carène verticale. Dans l’ensemble les cuspides linguales apparaissent légèrement plus élevées que les cuspides labiales. Le contour occlusal est allongé et étroit transversalement. Il est notablement échancré labialement au niveau de l’hypoflexide, et plus légèrement lingualement face à l’hypoflexide.
Le trigonide est sensiblement pincé mésio-distalement et la préfosside est très réduite et déversée mésialement. Par contraste, le talonide apparaît sensiblement allongé. Il est plus large que le trigonide sur m1 et m2 et légèrement moins large que celui-ci sur m3. Le flanc labial du trigonide est
Largeur particulièrement renflé. Le précingulide est généralement absent ou très réduit. Quand il est visible (OCP-CPSGM MA19), il apparaît subhorizontal et courbe. Le paraconide est absent. Deux rides mésiales, paracristide et prémétacristide, descendent de l’apex des protoconide et métaconide et convergent à mi-largeur à l’avant du trigonide. La prémétacristide, plus renflée, fait une saillie bien marquée sur le flanc mésial du protoconide. La postmétacristide est réduite à absente. Le métaconide paraît plus volumineux que le protoconide.
Le talonide présente un long bassin déversé mésialement. Celui-ci est délimité distalement par l’entolophide et latéralement par l’entocristide et la crête oblique. Ces deux dernières crêtes, discrètes et douces, sont sub-longitudinales. Elles s’incurvent parfois légèrement vers la postfosside, surtout dans le cas de l’entocristide. Quelques spécimens montrent le renflement généralement très faible sur ces crêtes d’un mésoconide, voire d’un entoconulide. La crête oblique joint le trigonide dans sa moitié labiale, sans y grimper. L’hypoconide est volumineux. L’entocristide s’affaiblit rapidement vers l’avant où l’encoche du talonide est large et bien creusée.
Sur m1 et m2 l’entolophide est bordé distalement d’un court cingulum. Celui-ci est isolé (sans liaison) des cuspides et crêtes du talonide. Deux cuspules sont plus ou moins bien renflées sur ce cingulum distal. La plus nette est l’hypoconulide, qui est renflé à l’extrémité labiale du cingulide, en arrière de l’hypoconide et légèrement en retrait lingualement. Un faible postentoconulide se renfle parfois à la terminaison linguale du cingulide, mais il est le plus souvent indistinct. Sur PM32 le postentoconulide est dédoublé. Sur m3 l’hypoconulide est volumineux et médian. Il forme un lobe distal plus ou moins important, mais qui reste nettement moins grand que le talonide et le trigonide. Le postentoconulide est absent sur les m3 du matériel disponible.
Les dents sont soutenues par deux racines élargies transversalement. L’usure des lophes forme à leur face postérieure des facettes en croissant. L’émail est légèrement plissé (voire pustuleux: MNHN PM13) à l’apex des crêtes sur les spécimens non usés, surtout chez les individus les plus grands.
m1 diffère de m2 d’abord par sa taille plus petite. Le rapport de surface (longueur × largeur) de ces dents varie de 53 % (PM46) à 81 % (PM32); il semble croissant avec la taille des spécimens. Le
A
m 3 m 2 m 1 p4 p3 p2 c1 i2 i1
Spécimen Rapport surface
M1/M2 PM22 0,60
OCP DEK/GE 305 0,86
OCP-CPSGM MA 12 0,63
MNHN PM2 0,58 M2/M3 PM22 1,00
OCP DEK/GE 305 0,65
talonide de m1 est globablement plus large comparativement au trigonide mais ce dernier caractère apparaît variable. Les racines semblent plus divergentes sur m1 que sur m2 avec une racine antérieure d’allure oblique vers l’avant comparativement à la racine postérieure. L’allure saillante du flanc mésio-labial qui caractérise également m1 pourrait être lié à ce caractère.
m3 diffère de m2 par sa taille plus grande (rapport de surface entre M2 et M3 = 75 % [OCP- C P S G M M A8] à 9 4 % [P M1 3]), m a i s l a
Spécimen Longueur diastème P1-P2
MNHN PM2 9,0
OCP-CPSGM MA 12 12,3
OCP DEK/GE 305 4,4
PM24 4,3
différence est moins accusée qu’entre m1 et m2 ( Figs 23-25 View FIG View FIG View FIG ). La différence de taille entre m3 et m2 est nettement plus sensible pour la longueur que pour la largeur, en corrélation avec l’importance de l’hypoconulide qui forme un lobe distal sur cette dent ( Fig. 23 View FIG ).
Variabilité morphologique des molaires inférieures: à côté d’une importante variabilité des dimensions, plusieurs caractères morphologiques des molaires inférieures font également l’objet d’une variation:
– le mésoconide est discret ou indistinct, mais parfois nettement renflé (MNHN PM13, PM23, PM32, PM46);
– l’entoconulide, généralement absent, est parfois distinct à l’état de trace (OCP-CPSGM MA8, PM13, PM32);
– l’extension du cingulide distal (= postcristide vestigiale) est plus (PM23) ou moins (PM32) importante labialement;
– l’ornementation ridulée de l’émail est plus marquée sur les spécimens de plus grande taille;
– le développement du précingulide;
– l’importance du lobe distal et de l’hypoconulide sur m3, plus (MNHN PM25, MNHN PM14, MNHN PM13) ou moins (OCP-CPSGM MA8) grand; – le postentoconulide est généralement réduit, mais distinct à l’état de trace chez quelques spécimens (PM46, OCP-CPSGM MA19, MNHN PM25, PM32);
– le spécimen MNHN PM14 (m3) montre la trace d’un possible paraconide à mi-largeur du trigonide;
– la présence d’une fovea distale sur le lobe de l’hypoconulide de m3 (PM13-14).
Prémolaires et denture antérieure inférieures. Caractères généraux: p4 et p3 sont les seules prémolaires connues. La couronne est relativement robuste comme pour les molaires. Elle se caractérise par une morphologie prémolariforme, simplifiée et dominée par le protoconide et une crête mésio-distale. Le contour occlusal est allongé. Deux incisives antérieures sont illustrées. L’incisive centrale (i1) est connue à l’état isolé (MNHN PM11) et l’incisive latérale (i2) est en place (en éruption) sur MNHN PM25. La canine est inconnue. Les alvéoles de l’ensemble de la denture antérieure sont préservés dans le matériel décrit, notamment chez le spécimen MNHN PM25 illustré dans les Figures 15 View FIG et 22 View FIG . Les dents antérieures sont alignées longitudinalement, suivant la disposition primitive.
p4: p4 est documentée par cinq spécimens (OCP-CPSGM MA8, PM23, MNHN PM25, PM32, moulage PM46). Elle est de longueur comparable à m1, mais plus étroite. Le contour occlusal est relativement allongé. Le trigonide est bien développé et le talonide est plus court. Leur largeur est comparable. Les trois cuspides principales sont par ordre d’importance, le protoconide, la cuspide du talonide (hypoconide) et le métaconide. Le paraconide est réduit, en position mésiale et haute (surplombe le talonide de la p3). Le protoconide est élevé et massif. La paracristide est haute, acérée et longitudinale. Le métaconide, bien renflé, est situé plus haut sur la couronne que le paraconide et en position plus ou moins distale comparativement au protoconide. La protocristide est en conséquence oblique et l’angle des paracristide et protocristide excède 90°. Le talonide porte une crête longitudinale médiane bien développée (crête oblique), située dans l’alignement de la protocristide. Sa terminaison distale correspond à une cuspide crestiforme et haute (hypoconide). Le talonide est généralement simplifié. Certains spécimens (PM23, PM46) montrent toutefois le développement d’une ride linguale à la base du métaconide et d’une très légère cuvette linguale (trace de postfosside).
p3: p3 est documentée par quatre spécimens (PM23, OCP-CPSGM MA26, PM32, moulage PM46). Elle a un contour et des dimensions voisins de p4. Elle diffère essentiellement par sa morphologie plus simplifiée, le contour plus étroit et les dimensions à peine plus petites. La couronne est dominée par un protoconide tranchant et élevé (légèrement élevé sur la rangée dentaire jugale). Le métaconide est absent ou réduit à une légère cuspule en position haute sur le flanc distal du protoconide (PM32). Les crêtes du protoconide (protocristide et métacristide) et du talonide sont alignées. Le talonide est bien développé et légèrement plus large que le trigonide contrairement à la p4. Il existe un très léger cingulum sur le flanc mésio-labial du trigonide.
Variabilité: la variabilité connue des prémolaires reste modeste. Chez p4, elle est illustrée par la taille et quelques caractères tels que la morphologie du flanc lingual du talonide (renflement d’une ride linguale et ébauche de dépression sur certains spécimens tels que PM23), la largeur du talonide par rapport au trigonide (PM32), le prolongement de la crête oblique sur le trigonide (OCP-CPSGM MA8, PM23), le développement du paraconide et l’allure générale plus ou moins massive. PM32 montre de petites cuspules accessoires (protostylide?) à la terminaison mésiale de la crête du talonide, contre le trigonide. Chez p3, la variabilité porte sur la trace de paraconide (OCP-CPSGM MA26) et la liaison entre les crêtes du trigonide et du talonide. Usure: p4 et p3 portent une facette d’usure (attrition) particulièrement bien développée sur le flanc labial de la paracristide et le flanc labial de la crête du talonide (crête oblique). Elles dénotent d’un certain fonctionnement cisaillant de ces dents avec les prémolaires supérieures.
p2, canine inférieure et incisives ( Fig. 22 View FIG ): les incisives antérieures sont documentées par deux spécimens (MNHN PM25, MNHN PM11). Les autres dents antérieures (p2 et c1?) sont inconnues, représentées seulement par deux alvéoles dentaires préservés sur quelques dentaires (OCP- CPSGM MA8, MNHN PM25, PM23).
MNHN PM25 préserve l’ensemble des alvéoles des dents antérieures à p3 ( Figs 15 View FIG ; 22 View FIG ). Quatre alvéoles antérieurs à p3 sont distincts. Les deux alvéoles dentaires antérieurs conservés sur MNHN PM25 sont ceux de deux incisives. Le premier alvéole est agrandi et s’ouvre à l’avant subhorizontalement; il est également visible sur PM23 et OCP-CPSGM MA8. Il correspond par sa taille et sa morphologie générale à une incisive agrandie, dont nous rapprochons la dent isolée représentée par le spécimen MNHN PM11 (voir cidessous). L’alvéole qui suit préserve une incisive définitive en cours d’éruption. Dans cet alvéole on peut distinguer deux ou trois minuscules chambres annexes en position labiale à la dent définitive en cours d’éruption qui pourraient correspondre aux alvéoles résiduels des incisives déciduales ( Fig. 22 View FIG ). Ceci est à rapprocher du fait que chez Moeritherium on observe que les incisives déciduales (petites) sont encore en place lorsque les incisives définitives sortent ( Tassy 1987).
Les deux alvéoles dentaires situés immédiatement en avant de p3 sur MNHN PM25 ont une taille comparable. Leur orientation et leur taille indiquent qu’ils correspondent à deux dents différentes. Le premier alvéole antérieur à p3 est celui de p2: il s’agissait ainsi d’une dent uniradiculée. Cette dent était sensiblement plus réduite que la p3, comme P2 comparativement à P3. L’alvéole plus antérieur (3 e dent) est légèrement plus petit et peut être interprété comme celui de (d)p1 ou de c1, ou moins probablement comme celui de i3.
Deux interprétations de la denture antérieure inférieure de Phosphatherium escuilliei sont donc possibles en l’état actuel: 1) i1, i2, i3 ou c1 ou (d)p1, p2; et 2) i2, i3, c1 ou (d)p1, p2.
La réduction des prémolaires antérieures et des incisives postérieures est plus fréquente que celle des canines. Cela favorise la rétention de la canine et la perte de (d)p1 et i3 chez Phosphatherium escuilliei . C’est en accord, d’une part avec la perte de la (d)p1 chez les proboscidiens décrits jusqu’ici et d’autre part avec la présence de canine à la denture supérieure de P. escuilliei (OCP DEK/GE 305) et des proboscidiens primitifs Numidotherium et Moeritherium . L’identification des dents antérieures de Daouitherium est également incertaine. On ne connaît que leurs alvéoles mal conservés, au nombre de trois ou quatre en avant de p2, ce qui rend possible la rétention non seulement de la canine, mais aussi de (d)p1 ou moins probablement de i3 ( Gheerbrant et al. 2002).
En ce qui concerne l’identification des incisives, une homologie de la dent agrandie avec celle de Moeritherium et des éléphantiformes (i2) favoriserait l’interprétation 2: i2, i3. D’un autre côté chez Moeritherium, Tassy (1987) souligne que i2 sort tardivement en même temps que m3 (après p2), ce qui correspond précisément à la situation illustrée par MNHN PM25 où m3 est en cours d’éruption en même temps que l’incisive latérale. Cette question de l’homologie des incisives inférieures se pose également chez Numidotherium ( Mahboubi et al. 1986; Luckett 1996), bien que la défense supérieure soit considérée homologue des éléphantiformes (I2). Elle se pose aussi pour Barytherium chez lequel Shoshani et al. (1996) identifient i1 et i2. En définitive la première interprétation – i1, i2, c1, p2 chez P. escuilliei – semble la plus acceptable, notamment par comparaison avec Numidotherium et Barytherium .
Incisive latérale i2: l’incisive latérale est préservée sur MNHN PM25 où elle est en cours d’éruption ( Figs 15C View FIG ; 22 View FIG ). Elle apparaît nettement plus petite que l’incisive centrale (ci-dessous), proportionnellement plus petite que chez Numi- dotherium et Barytherium , mais sans être de dimensions réduites. Sa forme est plus ou moins spatulée et asymétrique avec couronne courbée distalement et droite mésialement. Elle est comprimé labio-lingualement.
Incisive centrale i1 ( Fig. 16 View FIG D-F): le spécimen MNHN PM11 illustre une dent en tout point semblable à l’incisive centrale inférieure décrite chez Numidotherium koholense . Elle se caractérise par sa grande taille (hauteur totale = 35 mm) et une racine hypertrophiée, très allongée, mais probablement non ouverte. Les dimensions de cette dent sont tout à fait compatibles avec le grand alvéole antérieur préservé chez OCP-CPSGM MA8 et MNHN PM25. La couronne est comprimée labio-lingualement (l = 4,5 mm) et dilatée mésio-distalement (L = 6 mm), comme la i2 préservée sur MNHN PM25 (ci-dessus). La racine est également comprimée labio-lingualement. L’émail descend bas sur les flancs mésial et distal, et plus bas sur le flanc mésial où la couronne est la plus haute (20 mm). En vue latérale, l’émail apparaît en conséquence typiquement échancré vers le haut. En vues mésiale et labiale, la couronne a une allure triangulaire asymétrique avec un flanc médial redressé verticalement, et un flanc latéral plus oblique, dont l’apex est tronqué par l’abrasion. Un léger cingulum subvertical joint la crête apicale du côté latéral. D’après l’orientation de l’alvéole et l’allure de la couronne, cette incisive était sensiblement inclinée vers l’avant, voire sub-horizontale, dans une disposition comparable à celle de Numidotherium
A m 3 m 2 m 1
p4 p3 p2
koholense . Elle reste proportionnellement plus petite que chez Numidotherium .
Denture inférieure déciduale. Les dents de lait inférieures restent inconnues à ce jour.
Dimensions (mm, dimensions maximales). Voir Tableaux 7 et 8.
Les Figures 23-25 View FIG View FIG View FIG illustrent la dispersion et l’étendue de variation des dimensions des dents jugales inférieures de Phosphatherium escuilliei . La Figure 25 View FIG
montre la variation des dimensions des dents jugales inférieures selon leur rang chez Phosphatherium escuilliei et sa comparaison avec les autres proboscidiens lophodontes primitifs. Elle met en évidence la différence de taille plus accusée entre la première molaire et les molaires postérieures chez ces proboscidiens. – Incisive centrale i1 (MNHN PM11)
Longueur × largeur: 4,8 × 6 mm.
Hauteur couronne: 14,6 mm.
Hauteur racine (incomplète): 26 mm.
Hauteur couronne-racine: 35 mm.
– Incisive latérale i2 (MNHN PM25)
Longueur × largeur: 4,4 × 2,2 mm.
– Longueur de la rangée dentaire
OCP-CPSGM MA8: p4-m3: 37,7 mm.
MNHN PM25: p4-m2: 28,8 mm.
PM23: p3-m2: 38,6 mm.
PM32: p3-m2: 32 mm.
Formule dentaire de Phosphatherium escuilliei
La denture de Phosphatherium escuilliei compte neuf dent inférieures et probablement 11 dents supérieures par demi-mâchoire, dont la formule détaillée est établie ici comme suit:
I1 I2 I3 C1 (d)P1 P2 P3 P4 M1 M2 M3 i1 i2 - c1 - p2 p3 p 4 m 1 m 2 m 3
Dans cette interprétation de la formule dentaire de P. escuilliei , les incertitudes concernent essentiellement l’identification (homologie) de la canine inférieure et la perte (corrélative) de i3 et de dp1. La présence de trois incisives supérieures – non observée dans le matériel connu – est déduite de Numidotherium et Moeritherium .
Cette formule dentaire suppose une disparité dans le nombre de dents des dentures supérieure et inférieure chez Phosphatherium escuilliei , avec rétention possible de la (d)P1 et perte de la (d)p1. Une telle disharmonie est connue chez N. koholense et Moeritherium , qui conservent C1 mais ont perdu c1. Ces deux genres montrent même une différence de deux dents entre les rangées supérieure et inférieure (rétention de I3 et C1, absence de i3 et c1).
DESCRIPTION DE LA MANDIBULE ( FIGS 14 View FIG ; 16B, C View FIG ) La branche horizontale est étroite. Le condyle est peu élevé, situé à environ 18 mm au-dessus de la rangée dentaire (OCP-CPSGM MA8), ce qui est original pour une forme à denture spécialisée très lophodonte. Sa forme est sub-cylindrique transversalement. La branche montante est modérément élevée. Le bord antérieur de l’apophyse coronoïde est nettement décalé labialement par rapport à la rangée dentaire. Il est vertical et déprimé (concave), creusé à la base d’un net foramen coronoïde (OCP-CPSGM MA8) en arrière du talonide de m3 selon la disposition primitive. Il s’élève en arrière de m3. Le bord postérieur de l’apophyse coronoïde est peu concave (non échancré) en vue latérale. La fosse massetérienne est profonde; elle est délimitée à l’avant par une crête puissante et anguleuse formée par la marge antérolabiale de l’apophyse coronoïde. Les foramens mentonniers sont petits et situés à la hauteur de la racine distale de p4 ou de la racine mésiale de m1 et sous la canine (MNHN PM25, PM23). La symphyse n’est pas soudée. Elle s’étend distalement jusque sous l’avant de p3. Dans la région symphysaire, le bord ventral de la branche horizontale fait un décrochement vers le bas et apparaît concave. Le processus angulaire est très développé. Il est large ventro-dorsalement, arrondi et saillant sous le condyle comme chez Numidotherium . Le foramen mandibulaire, en forme de croissant, s’ouvre dans le prolongement de la rangée dentaire.
Mensurations de la mandibule.
Hauteur de la mandibule sous m1: OCP- CPSGM MA8: 18 mm; MNHN PM25: 19 mm. Hauteur totale de l’apophyse coronoïde: OCP- CPSGM MA8: 37,5 mm.
Hauteur de l’apophyse coronoïde au-dessus du condyle: OCP-CPSGM MA8: 15 mm.
Hauteur du condyle: OCP-CPSGM MA8: 40,5 mm.
Longueur totale estimée de la mandibule sans l’incisive antérieure: 110-115 mm (extrapolation d’après OCP-CPSGM MA8 (L = 105 mm) et MNHN PM25 (L = 96 mm) dont l’extrémité antérieure est incomplète).
DESCRIPTION DU MATÉRIEL POSTCRÂNIEN
Le seul matériel postcrânien qui peut être rapporté à Phosphatherium escuilliei est une phalange isolée MNHN PM38 illustrée Figure 26 View FIG . Il s’agit en fait du seul os postcrânien de mammifère identifié jusqu’ici dans les gisements à phosphates des Ouled Abdoun. Ce spécimen est rapproché de l’espèce P. escuilliei sur la base de plusieurs éléments: 1) la taille compatible; 2) la morphologie générale, notamment sa construction robuste; et 3) la fréquence relative: Phosphatherium escuilliei est de très loin le mammifère le plus abondant dans les gisements de Grand Daoui ( Gheerbrant et al. 2003).
Il s’agit probablement d’une phalange médiane (2) du pied ou de la main. Elle se caractérise par son allure générale trapue, très courte et large, et aplatie dorso-ventralement. Son extrémité proximale est élargie transversalement comparativement à l’extrémité distale. Il existe deux protubérances bien écartées sur les bords latéraux de l’extrémité proximale de la face ventrale. La face ventrale est plane-concave et la face dorsale est plus convexe. Deux dépressions concaves subcirculaires sont bien creusées sur l’extrémité distale des faces latérales. La surface articulaire distale est convexe, mais elle présente un profil concave transversalement. Elle est indentée à sa mi-largeur sur la face ventrale. La surface articulaire proximale est concave, très creusée et formée de deux dépressions confluentes à la mi-largeur.
La morphologie générale de cette phalange n’est pas sans rappeler celle décrite par Williamson & Lucas (1992) chez Meniscotherium , mais ce dernier est deux fois plus petit. Elle correspond également tout à fait à la description faite chez Numidotherium koholense par Court (1994a).
Le seul autre taxon connu dans les Ouled Abdoun auquel cette phalange peut être rapportée est un hyracoïde voisin de Seggeurius de taille comparable ou légèrement supérieure à P. escuillei , provenant des mêmes carrières de Grand Daoui ( Gheerbrant et al. 2003). Les phalanges des hyracoïdes ont cependant dans l’ensemble une morphologie moins trapue que celle décrite ici.
Dimensions
Longueur proximo-distale: 15,2 mm.
Largeur medio-latérale: 11,1 mm.
Hauteur dorso-ventrale: 7,1 mm.
VARIABILITÉ DE PHOSPHATHERIUM ESCUILLIEI
ET LIMITES DE VARIATION DE L’ ESPÈCE
Le matériel décrit ici montre une variabilité morphologique et dimensionnelle notable. Les caractères dentaires variables les plus remarquables sont les suivants:
– longueur du diastème P1-P2;
– bunodontie et lophodontie: certains spécimens tels que OCP DEK/GE 305 montrent des lophes incomplets sur les molaires supérieures et une couronne très bunodonte; c’est une variabilité particulièrement singulière dans le matériel de P. escuilliei ; – développement du mésostyle;
– développement des cingulums dans l’ensemble réduits, mais parfois bien distincts (e.g., cingulum lingual des molaires supérieures); le postcingulide des molaires inférieures est lui parfois réduit transversalement;
– présence d’une racine sous l’hypocône de M3; – développement transversal et métacône des P3-4; – individualisation de l’entoconulide et du mésoconide;
– lobe de l’hypoconulide de m3, parfois notablement réduit;
– traces occasionnelles de paraconide;
– postentoconulide plus ou moins distinct.
Il existe également une variabilité dans l’anatomie crânienne. La plus notable concerne la morphologie de la région infra-orbitaire et notamment de la fosse sous-maxillaire et du processus zygomatique du maxillaire. Le foramen infra-orbitaire est plus (OCP-CPSGM MA8, PM24) ou moins (OCP-CPSGM MA12) rapproché de l’orbite. Certains spécimens montrent une fosse sousmaxillaire bien creusée surmontée par un processus robuste qui forme une barre sous-orbitaire saillante (MNHN PM17), alors que sur d’autres ces mêmes structures sont moins affirmées (e.g., fosse sous-maxillaire peu creusée, MNHN PM2 [holotype], OCP-CPSGM MA8, OCP-CPSGM MA12, PM24). En outre, la hauteur de la fosse sous-maxillaire est plus ou moins grande et elle est inclinée subverticalement (OCP-CPSGM MA12, MNHN PM2 [holotype]) ou latéralement vers le haut. Cette région infra-orbitaire correspond à une importante zone d’insertion musculaire. Sa variation est également mise en évidence chez Numidotherium koholense et est reliée à un dimorphisme sexuel par Mahboubi et al. (1986).
La variabilité des dimensions, illustrée notamment dans les Figures 12 View FIG , 13 View FIG , 23 View FIG et 24 View FIG , est remarquable. Elle est plus évidente pour les dents inférieures qui sont les plus nombreuses dans le matériel récolté. Parmi celles-ci, OCP-CPSGM MA8 et PM32 représentent les plus petits individus, tandis que PM23 et PM46 correspondent aux plus grands individus. La variabilité importante de l’échantillon de Phosphatherium escuilliei décrit ici est indiquée notamment par les coefficients de variation dépassant souvent 10 (Tableaux 3 et 8). Toutefois les dimensions restent pour la plupart dans l’intervalle de confiance à 95 % de la moyenne, à l’exception de la m2 située à la marge. Les histogrammes montrent également dans plusieurs cas une distribution hétérogène des fréquences, mais aucune bimodalité franche n’apparaît.
La variabilité observée peut avoir plusieurs causes: – présence de plusieurs espèces ou populations. Cette hypothèse doit spécialement être mise en relation avec l’incertitude actuelle qui existe et doit être soulignée ici sur l’homogénéité de provenance stratigraphique du matériel décrit ici. L’ensemble du matériel provient le plus probablement des niveaux de phosphates de la base de l’Éocène des carrières de Grand Daoui, et essentiellement de l’intercalaire couches II-I (spécimens MNHN PM2 [holotype], MNHN PM13, MNHN PM14, MNHN PM17, OCP DEK/GE 305, OCP- CPSGM MA26). Toutefois, on ne peut écarter l’existence de plusieurs niveaux à mammifères dans cet intercalaire, et même dans les horizons phosphatés supérieurs de la couche I (voir Gheerbrant et al. 2003), et donc de plusieurs populations asynchrones. La perte d’information implicite sur l’origine précise du matériel est liée au fait que l’essentiel du matériel est de seconde main (carriers et circuit commercial). En l’état actuel des informations de provenance et des paramètres statistiques, nous en restons cependant à l’hypothèse d’une seule espèce bien représentée et variable;
– dimorphisme sexuel: il est suggéré par la variabilité de la région infra-orbitaire, comme chez Numidotherium koholense ( Mahboubi et al. 1986) . De façon générale, le dimorphisme sexuel est courant chez les ongulés, y compris chez les proboscidiens. Il faut souligner qu’il existe dans le matériel des gisements de Grand Daoui des molaires inférieures isolées telles que MNHN PM31 ( Fig. 20 View FIG ) et OCP-CPSGM MA5 qui sont rapprochées de Daouitherium rebouli sur la base de leur grande taille (respectivement 16,4 × 12,5 mm; 14,3 × 11 mm), mais qui restent sensiblement plus petites que le matériel de l’hypodigme de cette espèce (cf. Gheerbrant et al. 2002). Ces dents ont en fait une taille intermédiaire entre les m1 de Daouitherium rebouli et les m2 (et m3) les plus grandes de Phosphatherium escuilliei . Elles sont indifférenciables de l’une ou l’autre espèce sur la seule base de la morphologie. Nous avons effectué des tests statistiques (tests non paramé- triques: tests t, Kolmogorov-Smirnov, Mann-Whitney) pour évaluer la signification des différences de taille entre ces deux spécimens et les échantillons qui fondent les deux espèces Phosphatherium escuilliei et Daouitherium rebouli . Les résultats rassemblés dans les Tableaux 9 et 10 écartent clairement MNHN PM31 ( Fig. 20 View FIG ) et OCP-CPSGM MA5 de Phosphatherium escuilliei . Ils indiquent une différence moins tranchée comparativement à Daouitherium rebouli : seul le test de Student sur la moyenne indique une différence significative dans ce cas.
COMPARAISONS ET ANALYSES DES PRINCIPAUX CARACTÈRES DE PHOSPHATERIUM ESCUILLIEI
(VOIR ANNEXE 1)
Les caractères analysés sont ceux connus chez Phosphatherium (voir Annexe 1). L’analyse porte sur les caractères crâniens décrits ici et sur les traits dentaires, présentés en partie précédemment dans l’étude de Daouitherium ( Gheerbrant et al. 2002) . Certaines des polarités des caractères dentaires admises par Gheerbrant et al. (2002) sont rediscutées. La comparaison se fonde sur nos observations et sur les travaux publiés sur les ongulés lophodontes (e.g., Tassy 1981, 1990, 1996; Domning et al. 1986; Mahboubi et al. 1986; Novacek 1986; Novacek & Wyss 1986; Tassy & Shoshani 1988; McKenna et al. 1989; Thewissen 1990; Froehlich 1999, 2002; Court 1992b, 1995; Thewissen & Domning 1992; Fischer & Tassy 1993; Domning 1994; Ray et al. 1994; Savage et al. 1994; Thewissen & Simons 2001; De Blieux & Simons 2002; Gheerbrant et al. 2005). En ce qui concerne Barytherium , encore largement inédit, la description des caractères se fonde sur Tassy (1990, 1994, 1996), Court (1995) et Shoshani et al. (1996).
Taxons comparés
Les taxons comparés de façon privilégiée ici avec Phosphatherium sont les proboscidiens. La comparaison est étendue aux représentants primitifs (représentatifs des morphotypes ancestraux) de plusieurs autres groupes d’ongulés qui ont été plus ou moins étroitement apparentés aux proboscidiens, ainsi qu’aux « condylarthres » phénacodontidés et à quelques taxons africains anciens importants tels que Ocepeia et Khamsaconus . L’objectif est la polarisation des caractères à la base des proboscidiens (comparaison extragroupe) et l’analyse des relations inter-ordinales des proboscidiens (e.g., hypothèses des Altungulata, Paenungulata, Tethytheria).
La liste des taxons comparés est la suivante:
Phosphatherium escuilliei , Daouitherium , Numidotherium ( N. koholense ), Barytherium , deinothères, Moeritherium, éléphantiformes primitifs ( Phiomia , Palaeomastodon ), Khamsaconus (holotype de K. bulbosus seulement), anthracobunidés ( Anthracobune pinfoldi ), siréniens primitifs ( Prorastomus , Pezosiren , Protosiren , Eosiren , Eotheroides , Prototherium ), desmostyliens ( Behemotops ), phénacolophidés ( Phenacolophus , Minchenella , Radinskya ), phénacodontidés ( Ectocion ), Ocepeia , périssodactyles primitifs ( Hyracotherium , Cymbalophus , Pachynolophus ), hyracoïdes primitifs ( Seggeurius , Microhyrax et Pliohyracidae ), embrithopodes (Palaeoamasiidae, Arsinoitherium ).
En ce qui concerne Khamsaconus , seule une dP4 est connue (holotype de K. bulbosus ). Le fragment de molaire inférieure attribué à ce genre par Gheerbrant et al. (1998) appartient en fait probablement à un hyracoïde proche de Seggeurius . Les caractères des molaires de Khamsaconus sont inférés d’après cette dP4. Celle-ci montre en effet de nettes réminiscences avec P. escuilliei ( Gheerbrant et al. 1998) , où la dP4 est très proche des molaires, malgré quelques différences. La comparaison de Numidotherium est fondée sur l’espèce N. koholense . N. savagei , dont seule la denture inférieure est connue ( Court 1995), n’est pas intégré dans la matrice. Ses caractères singuliers par rapport à N. koholense sont toutefois mentionnés dans les commentaires. La denture supérieure de Minchenella est documentée par le spécimen 73160 (76) de Nonshan Fm conservant M1-3.
ANALYSE CLADISTIQUE DES CARACTÈRES
DE PHOSPHATHERIUM ESCUILLIEI ,
RELATIONS PHYLOGÉNÉTIQUES
Matrice des caractères et analyse de parcimonie
La liste et la matrice des caractères étudiés sont données dans le Tableau 11 et l’Annexe 2.
129 caractères dentaires et crâniens connus chez P. escuilliei , dont 12 non additifs, sont analysés ici à l’aide du programme Hennig86 ( Farris 1988) et de son interface Winclada (Nixon
A
1 - Pneumatisation des os de la cavité crânienne 69 - Molaires inférieures: orientation de la crête 2 - Allure générale du crâne oblique
3 - Extension de la rangée dentaire 70 - Molaires inférieures: développement et morpho- 4 - Nasal: allongement logie de la crête oblique
5 - Nasal: élévation 71 - Molaires inférieures: entocristide (n)
6 - Fosses nasales 72 - Molaires inférieures: prémétacristide
7 - Contact prémaxillaire-frontal 73 - Molaires inférieures: postmétacristide, méta- 8 - Lacrymal stylide
9 - Tubercule du lacrymal 74 - Molaires inférieures: paraconide
10 - Position des orbites 75 - Molaires inférieures: trigonide et paracristide
11 - Composition de l’orbite, développement relatif du 76 - Molaires inférieures: protolophide
jugal et du maxillaire 77 - Molaires inférieures m1-2: complexe post-
12 - Foramen infra-orbitaire: développement cristide-hypoconulide
13 - Foramen infra-orbitaire: position 78 - Molaires inférieures: hypolophide (entolophide)
14 - Fosse sous-maxillaire (= fosse sous-orbitaire) 79 - Molaires inférieures: complexe lophe distal
15 - Tuber maxillae (hypolophide)-postcristide (n)
16 - Lamina ascendens du palatin dans la fosse orbito- 80 - Molaires inférieures: relations hypoconulidetemporale entoconide
17 - Jugal 81 - Molaires inférieures m1-2: position de l’hypoco-
18 - Constriction post-orbitaire nulide (n)
19 - Processus post-orbitaire du frontal 82 - m1: postentoconulide
20 - Processus post-orbitaire du jugal (n) 83 - m2: postentoconulide
21 - Arcades zygomatiques 84 - m3: postentoconulide
22 - Squamosal (écaille) 85 - Molaires inférieures: allure des lophes
23 - Processus zygomatique du squamosal 86 - Taille relative des molaires inférieures (m3) (n)
24 - Sutures pariétal et squamosal 87 - m3: développement du lobe postérieur (hypoco-
25 - Méat auditif externe: position nulide)
26 - Méat auditif externe et apophyse post-tympanique 88 - Nombre d’incisives supérieures
27 - Crête sagittale 89 - Incisives supérieures: agrandissement absolu
28 - Crêtes nucales (c. lambdoïdes) 90 - Agrandissement relatif de I1
29 - Périotique: mastoïde (amastoïdie) 91 - Agrandissement relatif de I2
30 - Périotique: mastoïde (fenêtre) 92 - Incisives supérieures: défense
31 - Périotique: pars mastoidea 93 - Diastème supérieur antérieur
32 - Périotique: pars cochlearis 94 - C1: taille, présence
33 - Foramen post-glénoïdien (= f. rétroarticulaire) 95 - C1: nombre de racines
34 - Foramen hypoglosse (f. condylien) 96 - (d)P1: présence/absence
35 - Foramen ethmoidien 97 - (d)P1: nombre de racines
36 - Foramen optique 98 - P2: présence/absence
37 - Occipital 99 - P2: nombre de racines (n)
38 - Symphyse mandibulaire: extension par rapport 100 - P2: développement transversal et protocône aux prémolaires 101 - P3: protocône: développement
39 - Symphyse mandibulaire: fusion 102 - P3: protocône: position
40 - Branche horizontale: hauteur 103 - P3: hypocône
41 - Apophyse coronoïde: position 104 - P3: métacône
42 - Apophyse coronoïde: orientation 105 - P3-4: conules
43 - Apophyse coronoïde: développement 106 - P3-4: nombre de racines
44 - Condyle articulaire 107 - P4: métacône
45 - Foramen coronoïde 108 - P4: hypocône
46 - Dimensions dentaires 109 - P4: nombre de lophes
47 - Nombre d’incisives inférieures 110 - Molaires supérieures: parastyle
48 - Incisives inférieures: allure 111 - Molaires supérieures: relations préparacrista et
49 - Incisives inférieures: agrandissement absolu protolophe (n)
50 - Incisives inférieures: agrandissement relatif de i1 112 - Molaires supérieures (et dP4): centrocrista (incisive centrale) 113 - Molaires supérieures (et dP4): mésostyle
51 - Incisives inférieures: agrandissement relatif de i2 114 - Molaires supérieures: conules
(incisive latérale) 115 - M1 (et dP4): postentoconule
52 - Incisives inférieures: défense 116 - M2: postentoconule
53 - Canine inférieure: présence 117 - M3: postentoconule
54 - Canines inférieures: nombre de racines 118 - Molaires supérieures: distocrista
55 - Denture inférieure: diastème antérieur 119 - Molaires supérieures: postprotocrista
56 - (d)p1: présence 120 - Molaires supérieures: allure des lophes (n)
57 - (d)p1: nombre de racines 121 - Molaires supérieures: cingulum lingual
58 - Denture inférieure: p2 122 - Molaires supérieures: racine linguale (nombre de
59 - p2: nombre de racines racines)
60 - p3-4: nombre de racines (n) 123 - Molaires supérieures: taille relative (M3) (n)
61 - Prémolaires inférieures: molarisation 124 - Molaires supérieures: plan structural: dilambdo-
62 - Prémolaires inférieures p1-4: simplification dontie
63 - Prémolaires inférieures: paraconide (position) 125 - Molaires supérieures: plan structural: lopho-
64 - Prémolaires inférieures: paraconide (développe- dontie (n)
ment) 126 - Molaires inférieures: plan structural: lopho-
65 - Prémolaires inférieures: bilophodontie de p4 dontie (n)
66 - Prémolaires inférieures: taille relative de p2 127 - M1/m1: nombre de lophes
67 - Prémolaires inférieures: extension de l’émail 128 - M2-3/m2-3: nombre de lophes
68 - Prémolaires et molaires inférieures: cingulum labial 129 - Nombre de prémolaires
1999), par comparaison avec 20 taxons. Parmi les proboscidiens, la comparaison est détaillée aux formes lophodontes primitives, aux deinothères, à Moeritherium et à l’ensemble des élép h a n t i f o r m e s r e p r é s e n t é s p a r l e u r s g e n r e s primitifs Palaeomastodon et Phiomia . L’extragroupe correspond ici au morphotype euthérien, présumé ici représenté par les leptictidés (e.g., Novacek 1986). La comparaison des proboscidiens est toutefois étendue aussi à l’ensemble des ongulés lophodontes (Altungulata = Pantomesaxonia), y compris les « Phenacolophidae », et à leur formes présumées apparentées parmi les « condylarthres » telles que les Phenacodontidae et Ocepeia . Ils comprennent neuf taxons ( Ocepeia , Phenacodontidae , Perissodactyla , Radinskya , Hyracoidea , Phenacolophus , Minchenella , Desmostylia , Sirenia ; voir leur systématique dans le Tableau 14) qui forment ce que l’on peut appeler le « groupe de branchement » sensu Antoine (2002: 32). Ces extragroupes permettent de tester non seulement la monophylie des Proboscidea , mais aussi celles des Tethytheria et des Paenungulata. Par contre, il faut souligner que la monophylie du clade Altungulata (et aussi des Taxeopoda) ne peut être testée significativement ici car l’analyse n’inclut pas les taxons extra-groupes importants qui participent à l’hypothèse alternative des Africana et Afrotheria issue des analyses moléculaires ( Springer et al. 1997; Stanhope et al. 1998; Murphy et al. 2001). Il manque en particulier l’ordre des Macroscelidea présumé enraciné à la base des Paenungulata et des Tubulidentata, et formant avec eux le clade des Africana ( Springer et al. 1997).
La matrice de données comporte 2580 états de caractères. Parmi ceux-ci 598 correspondent à des états de caractères non observés pour des raisons de préservation (codés «? »), soit 23 % des états. Une telle situation est pratiquement la règle en paléontologie. Le résultat, du point de vue de l’analyse de parcimonie, est une optimisation d’un grand nombre d’états non observés qui peut être d’une part ambiguë et, d’autre part, source d’amplification du bruit si les états observés sont fortement contradictoires. On verra que, sur ce plan, les caractères non observés affectent peu le niveau de résolution des arbres.
Résultats de l’analyse cladistique ( Figs 28-31 View FIG View FIG View FIG View FIG )
Deux analyses cladistiques de la matrice établie ici ont été développées par l’algorithme d’énumération implicite, un algorithme exact qui génère tous les arbres parcimonieux s’il y en a plusieurs (ce qui est le cas ici): 1) une analyse non pondérée; et 2) une analyse de la matrice après pondération successive.
Analyse non pondérée ( Figs 28-30 View FIG View FIG View FIG ). L’analyse exacte non pondérée des 20 taxons et 129 caractères (commande ie de Hennig86 et interface Winclada) donne six arbres de longueur minimale (L = 353 pas, IC = 48 et IR = 64). Le consensus strict (L = 371 pas, IC = 46, IR = 60) montre ( Fig. 28 View FIG ) que les contradictions entre les 17 noeuds internes dichotomiques de ces six arbres se réduisent à deux zones, une zone profonde et une zone superficielle:
– l e n oe u d p r o f o n d d é f i n i s s a n t l a b a s e d e s Altungulata, correspondant aux relations non résolues de Radinskya et des Perissodactyla ;
– et deux noeuds définissant les relations des proboscidiens évolués; deux topologies possibles des proboscidiens figurent dans ces arbres: a) ( Phosphatherium , Khamsaconus ) ( Numidotherium ( Daouitherium , Barytherium ) ( Deinotheriidae ( Moeritherium, Elephantiformes ))) et b) ( Phosphatherium , Khamsaconus ) ( Numidotherium ( Daouitherium , Barytherium )) ( Moeritherium ( Deinotheriidae, Elephantiformes )). Si la solution b paraît plus acceptable que a dans la position relative de Moeritherium , les deux solutions sont critiquables dans la position de Daouitherium groupe-frère de Barytherium . Daoui- t h e r i u m e s t e n e f f e t b i e n p l u s p r i m i t i f q u e Numidotherium pour plusieurs caractères importants (cf. Diagnose).
Cet arbre de consensus n’inclut que 29 caractères non homoplastiques, dont six sont de position ambiguë (23, 30, 49, 86, 91, 102). D’autre part, 27 caractères ne soutiennent aucun noeud interne (ils changent autant qu’il leur est possible de changer, IR = 0).
Les données sont donc fortement homoplastiques. L’indice de rétention global est faible (IR = 64 pour les six arbres, IR= 60 pour le consensus). En règle générale, un indice de rétention situé entre 50 et 75 indique une forte homoplasie qui incite à la prudence quant à l’estimation de la qualité du signal (un score inférieur à 50 indiquant un signal extrêmement faible). Toutefois, les données sont suffisamment structurées pour que l’arbre de consensus strict soit relativement bien résolu. Cette structuration est principalement liée aux 83 caractères dentaires. L’analyse de ces seuls caractères dentaires donne cinq arbres (L = 258 pas, IC = 46, IR = 60) dont l’arbre de consensus strict ( Fig. 29 View FIG ) montre que l’absence de résolution se situe dans la zone profonde (relations de Radinskya et des Perissodactyla ). Les 45 caractères cranio-mandibulaires, quoique moins homoplastiques (l’indice de rétention de chacun des arbres de longueur minimale est de 77 contre 60 pour les caractères dentaires), sont moins pertinents. Le nombre maximal d’arbres sauvegardés est de 2973 arbres avec un signal d’« overflow » (L = 86 pas, IC = 59, IR = 77). L’arbre de consensus, très faiblement résolu (L = 130 pas, IC = 39, IR = 49), ne résoud que les noeuds superficiels liés aux proboscidiens ( Fig. 30 View FIG ). Le très grand nombre de caractères cranio-mandibulaires non observés compatibles avec différentes optimisations sur un grand nombre d’arbres de longueur minimale, est responsable de cette situation. Néanmoins, comme il est précisé plus haut, l’arbre de consensus issu de l’analyse simultanée des 129 caractères est relativement bien résolu ( Fig. 28 View FIG ) malgré son faible indice de rétention (IR = 60): le degré de contradiction entre les états observés n’est pas élevé entre caractères cranio-mandibulaires et dentaires d’une part et, d’autre part, à l’intérieur même de la distribution des caractères dentaires qui structurent l’arbre.
Analyse pondérée ( Fig. 31 View FIG ). La pondération successive à partir des six arbres non pondérés (quatre itérations avant stabilité du résultat) donne trois arbres (L = 993 pas, IC = 73, IR = 85) dont le consensus strict (L = 993 pas, IC = 73,
IR = 85) montre ( Fig. 31 View FIG ) que la seule contradiction réside dans la base des Altungulata, c’est-à-dire dans les relations de Radinskya et des Perissodactyla . Les différents noeuds impliquant les proboscidiens sont résolus, mais la topologie est différente de celles obtenues avant la pondération successive (notamment permutation des positions de Daouitherium et de Numidotherium ). L’arbre de consensus obtenu après pondération successive maximise l’homologie de telle façon que celle-ci est, d’une certaine manière, surévaluée conformément à la logique de pondération successive. Les fondements de l’approche de pondération sont parfois critiqués ou, en tout cas, fortement soupçonnés d’introduire des décisions arbitraires ( Swofford & Olsen 1990). Sans nous étendre trop longuement sur ce point, nous assimilons cette approche à une modélisation de type structural (« pattern ») du comportement des caractères, fondée sur le principe de parcimonie puisque le poids accordé aux caractères est lié aux scores d’homologie obtenus avant pondération successive (IC × IR = indice de cohérence recalculé (rescaled consistency index), selon la procédure préconisée par Farris 1988, 1989). Comme l’indice de rétention IR est le meilleur estimateur de l’homoplasie, une pondération successive fondée sur ce seul indice est également conduite (logiciel PAUP 3.1, Swofford 1993). L’arbre de consensus de trois arbres ainsi obtenu contient une différence notable par rapport à la Figure 31 View FIG : le clade ( Numidotherium ( Daouitherium , Barytherium )). Ce clade appartient à trois des arbres de l’analyse non pondérée (voir plus haut topologie (b) des proboscidiens) et la position de Daouitherium correspond à celle de tous les arbres non pondérés ( Fig. 28 View FIG ).
L’arbre de consensus des trois arbres obtenus après pondération successive fondée sur l’indice de cohérence recalculé (IC × IR) ( Fig. 31 View FIG ) est pris comme le résultat à partir duquel sont discutées les optimisations des états aux noeuds. Les sources des contradictions avec les arbres initiaux avant pondération successive et avec la pondération fondée sur l’indice de rétention (IR) sont discutées.
Cet arbre inclut 39 caractères non homoplastiques et 16 caractères qui ne soutiennent aucun
Synapomorphies: noeud 35: Taxeopoda: 61 (1) *, 68 (1) *, 71 (2) *, 74 (1) *, 77 (1) *; noeud 34: Altungulata: 9 (1) *, 39 (1) *, 80 (2) *, 119 (1) *, 120 (1), 122 (1) *, 125 (1) *, 126 (1) *, 127 (1) *, 128 (1); noeud 33: Paenungulata: 26 (1) *, 29 (1) *, 45 (1) *, 63 (1) *, 89 (1), 99 (1) *; noeud 32: 5 (1) *, 9 (0) *, 12 (1), 13 (1) *, 25 (1) *, 33 (12) *, 46 (1) *, 77 (3) *, 80 (3) *, 97 (1); noeud 31: 76 (1) *, 79 (3) *, 87 (0) *, 122 (2) *, 126 (2) *; noeud 30: Tethytheria: 84 (2) *, 122 (0) *; noeud 29: 73 (0) *, 75 (1) *, 85 (1) *, 110 (1) *; noeud 28: 59 (1) *, 69 (1) *, 107 (1) *, 112 (1) *; noeud 27: 14 (1), 38 (1) *, 68 (0) *, 115 (1) *, 116 (1) *, 117 (1) *, 118 (1) *, 120 (2); noeud 26: Proboscidea : 11 (1), 24 (1) *, 31 (1), 36 (1) *, 47 (1), 50 (1) *, 56 (1), 72 (1) *, 76 (1) *, 79 (3) *, 81 (2) *, 84 (1) *, 114 (1) *, 121 (0) *, 125 (2) *, 126 (2) *; noeud 25: 46 (0) *, 110 (0) *, 112 (0) *; noeud 24: 1 (1) *, 2 (1), 3 (1), 20 (1) *, 22 (1), 34 (1) *, 53 (1) *, 55 (1), 59 (1) *, 65 (1) *, 93 (2) *, 94 (12) *, 96 (1), 100 (1) *; noeud 23: 104 (0) *, 107 (0) *; noeud 22 (« proboscidiens avancés »): 32 (1) *, 50 (0) *, 51 (1), 82 (2) *, 107 (2) *.
Autapomorphies: Ocepeia : 63 (1) *, 72 (1) *; Phenacodontidae : 5 (1) *, 21 (1) *, 26 (1) *, 57 (1) *, 113 (1) *, 124 (1) *; Radinskya : 121 (0) *, 122 (2) *; Perissodactyla : 15 (1) *, 24 (1) *, 111 (1) *; Hyracoidea : 17 (1) *, 20 (2) *, 54 (0) *, 61 (0) *, 75 (1) *, 77 (0) *, 85 (1) *, 95 (0) *, 100 (2) *, 114 (1) *, 118 (1) *; Phenacolophus : 57 (1) *, 59 (1) *, 63 (0) *, 71 (0) *, 74 (0) *, 99 (2) *, 101 (0) *; Embrithopoda : 38 (1) *, 73 (0) *, 100 (1) *, 114 (1) *, 124 (2) *, 125 (0) *; Minchenella : 57 (1) *, 119 (0) *; Anthracobunidae : 43 (1), 72 (1) *; Desmostylia : 83 (1) *, 87 (0) *, 107 (0) *, 113 (1) *; Sirenia : 6 (1) *, 7 (1) *, 28 (1), 29 (0) *, 33 (0) *, 54 (0) *, 60 (2), 62 (1), 95 (0) *, 106 (0) *, 129 (0) *; Khamsaconus : 111 (0) *; Daouitherium : 53 (0) *, 55 (0) *, 67 (1) *; Numidotherium : 66 (1), 67 (1) *, 110 (0) *; Barytherium : 41 (1) *, 42 (1) *, 60 (1), 106 (2) *, 107 (0) *, 115 (0) *, 116 (0) *, 117 (0) *, 122 (2) *; Moeritherium : 1 (0) *, 8 (1), 18 (1), 19 (1) *, 41 (1) *, 42 (1) *, 45 (0) *, 65 (0) *, 93 (1) *; Deinotheriidae : 27 (1) *, 87 (0) *, 88 (3) *, 98 (1), 116 (0) *, 117 (0) *; Elephantiformes: 10 (0) *, 20 (0) *, 36 (2) *, 92 (1), 99 (0) *, 100 (0) *, 128 (2).
Caractères ambigus non homoplastiques (deltrans): 23 (1) (noeud 28), 30 (1) ( Sirenia ), 49 (1) (noeud 32), 86 (1) ( Phenacodontidae ), 86 (2) (Altungulata), 91 (1) (noeud 24) et 102 (1) (noeud 35: Taxeopoda).
noeud interne (IR = 0) contre respectivement 29 et 27 dans le cas de l’arbre de consensus obtenu avant pondération successive. Six caractères d’indice de rétention nul dans l’arbre de consensus non pondéré (37, 52, 58, 103, 108, 109), deviennent non homoplastiques dans l’arbre obtenu après pondération successive. Parmi les caractères optimisés de façon ambiguë, neuf ont un indice de rétention de 100, c’est-à-dire qu’ils sont une synapomorphie unique quel que soit le noeud où leur transformation est optimisée. Ce sont les caractères 2, 3, 22, 23, 30, 49, 86, 91, 96 et 102. Parmi eux, le caractère 30 (1) est le plus fluctuant puisque l’état 1 peut être optimisé sur 14 noeuds internes différents (sur un total de 17). Cependant cette fluctuation est liée en grande partie à des taxons « non applicables »: il s’agit probablement d’une autapomorphie de sirénien. Huit autres caractères présentent des optimisations différentes sur un grand nombre de noeuds (de 7 à 13 noeuds) et sont tous très fortement homoplastiques (IR de 0 à 70): 26 (IR = 57), 33 (IR = 70), 44 (IR = 40), 61 (IR = 40), 90 (IR = 0), 105 (IR = 25), 123 (IR = 33), 124 (IR = 25). Ce
Synapomorphies: noeud 35: Taxeopoda: 61 (1) *, 68 (1) *, 71 (2) *, 74 (1) *, 77 (1) *; noeud 34: Altungulata: 9 (1) *, 39 (1) *, 80 (2) *, 119 (1) *, 120 (1), 122 (1) *, 125 (1) *, 126 (1) *, 127 (1), 128 (1); noeud 33: Paenungulata: 26 (1) *, 29 (1) *, 45 (1) *, 63 (1) *, 89 (1), 99 (1) *; noeud 32: 5 (1) *, 9 (0) *, 12 (1), 13 (1) *, 25 (1) *, 33 (12) *, 46 (1) *, 77 (3) *, 80 (3) *, 97 (1); noeud 31: 76 (1) *, 79 (3) *, 87 (0) *, 122 (2) *, 126 (2) *; noeud 30: Tethytheria: 84 (2) *, 122 (0) *; noeud 29: 73 (0) *, 75 (1) *, 85 (1) *, 110 (1) *; noeud 28: 59 (1) *, 69 (1) *, 107 (1) *, 112 (1) *; noeud 27: 14 (1), 38 (1) *, 68 (0) *, 115 (1) *, 116 (1) *, 117 (1) *, 118 (1) *, 120 (2); noeud 26: Proboscidea : 11 (1), 24 (1) *, 31 (1), 36 (1) *, 47 (1), 50 (1) *, 56 (1), 72 (1) *, 76 (1) *, 79 (3) *, 81 (2) *, 84 (1) *, 125 (2) *, 126 (2) *; noeud 25: 46 (0) *, 110 (0) *, 112 (0) *; noeud 24: 59 (0) *, 65 (1) *; noeud 23: 53 (1), 55 (1); noeud 22 (« proboscidiens avancés »): 32 (1) *, 50 (0) *, 51 (1), 82 (2) *, 107 (2) *; noeud 21: 64 (1) *; noeud 20: 6 (1) *, 7 (1) *, 35 (1) *, 37 (1), 47 (2), 52 (1), 58 (1), 63 (0) *, 88 (2) *, 94 (2) *, 103 (1), 108 (1), 109 (1), 122 (2) *, 127 (2).
Autapomorphies: Ocepeia : 63 (1) *, 72 (1) *; Phenacodontidae : 5 (1) *, 21 (1) *, 26 (1) *, 57 (1) *, 113 (1) *, 124 (1) *; Radinskya : 121 (0) *, 122 (2) *; Perissodactyla : 15 (1) *, 24 (1) *, 111 (1) *; Hyracoidea : 17 (1) *, 20 (2) *, 54 (0) *, 61 (0) *, 75 (1) *, 77 (0) *, 85 (1) *, 95 (0) *, 100 (2) *, 114 (1) *, 118 (1) *; Phenacolophus : 57 (1) *, 59 (1) *, 63 (0) *, 71 (0) *, 74 (0) *, 99 (2) *, 101 (0) *; Embrithopoda : 38 (1) *, 73 (0) *, 100 (1) *, 114 (1) *, 124 (2) *, 125 (0) *; Minchenella : 57 (1) *, 119 (0) *; Anthracobunidae : 43 (1), 72 (1) *; Desmostylia : 83 (1) *, 87 (0) *, 107 (0) *, 113 (1) *; Sirenia : 6 (1) *, 7 (1) *, 28 (1), 29 (0) *, 33 (0) *, 54 (0) *, 60 (2), 62 (1), 95 (0) *, 106 (0) *, 129 (0) *; Khamsaconus : 111 (0) *; Daouitherium : 67 (1) *, 104 (0) *, 107 (0) *; Numidotherium : 61 (1) *, 66 (1), 67 (1) *, 110 (0) *; Barytherium : 41 (1) *, 42 (1) *, 60 (1), 88 (1) *, 94 (2) *, 104 (0) *, 106 (2) *, 107 (0) *, 115 (0) *, 116 (0) *, 117 (0) *, 122 (2) *; Moeritherium : 8 (1), 18 (1), 19 (1) *, 41 (1) *, 42 (1) *, 45 (0) *, 65 (0) *; Deinotheriidae : 27 (1) *, 87 (0) *, 88 (3) *, 98 (1), 116 (0) *, 117 (0) *; Elephantiformes: 10 (0) *, 20 (0) *, 36 (2) *, 92 (1), 128 (2).
Caractères ambigus non homoplastiques (deltrans): 2 (1) (noeud 23), 3 (1) (noeud 23), 22 (1) (noeud 23), 23 (1) (noeud 28), 30 (1) ( Sirenia ), 49 (1) (noeud 32), 86 (1) ( Phenacodontidae ), 86 (2) (Altungulata), 91 (1) (noeud 23), 96 (1) (noeud 23) et 102 (1) (Taxeopoda).
nombre est en fin de compte relativement faible en raison de la bonne structuration des différents arbres de longueur minimale et de l’arbre de consensus.
Dans la discussion qui suit concernant la structuration du cladogramme et l’interprétation des transformations évolutives, nous nous fondons sur les caractères non ambigus. Parmi ceux-ci, à la distinction entre caractères non homoplastiques et homoplastiques, nous ajoutons une subdivision des caractères homoplastiques en « faiblement homoplastiques » (IR ≥ 75) et « fortement homoplastiques » (IR ≤ 75). Ce choix est d’autant plus nécessaire que le raisonnement s’appuie sur l’arbre obtenu après pondération successive, c’est-à-dire après maximisation des indices (les indices sont calculés à partir des meilleurs scores sur l’ensemble des arbres).
Topologie des cladogrammes. Dans les deux analyses développées (pondérée et non pondérée), les arbres obtenus sont peu nombreux et globalement bien résolus, spécialement pour la partie basale à la racine des proboscidiens ( Figs 28 View FIG ; 31 View FIG ), et cela malgré une forte homoplasie. Dans les deux cas, l’arbre consensus montre une position relative non résolue de Radinskya , des périssodactyles et des autres ongulés lophodontes ( Fig. 28 View FIG : noeud 34; Fig. 31 View FIG : noeud 34). Plusieurs points communs importants des cladogrammes obtenus méritent d’être soulignés:
– le clade des taxéopodes, qui rassemble les phénacodontes et les ongulés lophodontes, est soutenu dans tous les cas, mais il exclut Ocepeia ;
– les hyracoïdes sont apparentés aux téthythères plutôt qu’aux périssodactyles, ce qui soutient l’hypothèse du clade Paenungulata;
– Phenacolophus et les embrithopodes sont groupes-frères comme l’ont conclu initialement McKenna & Manning (1977);
– les embrithopodes ont une position primitive notable comparativement aux analyses antérieures. Ils correspondent au groupe-frère des téthythères, et non à celui des proboscidiens s. s. (e.g., Court 1992b; Fischer & Tassy 1993);
– le clade des téthythères est bien soutenu. Toutefois, l’appartenance des embrithopodes au clade des téthythères est plus discutable au regard de notre analyse. D’une part leur position basale remarquable dans ce clade associée à leurs spécialisations (autapomorphies) dentaires remarquables et divergentes méritent d’être soulignées dans un taxon particulier; d’autre part, le clade Phenacolophus -embrithopodes semble avoir une position instable, d’après le cladogramme fondé sur les seuls caractères dentaires qui les rapprochent des hyracoïdes, comme Andrews (1906) l’a suggéré initialement;
– Minchenella , les anthracobunidés et les desmostyliens sont des téthythères primitifs. Cela rejoint les conclusions antérieures: Minchenella et anthracobunidés: Wells & Gingerich (1983), Domning et al. (1986); desmostyliens: Tassy (1981) et Fischer & Tassy (1993). Il faut toutefois noter que la position relative de ces taxons reste la moins solide dans le cladogramme, elle est soutenue seulement par quelques homoplasies;
– les siréniens sont le groupe-frère des proboscidiens, selon la vue classique (e.g., Tassy 1981);
– Phosphatherium est, avec Khamsaconus , le groupe-frère de l’ensemble des proboscidiens, et leur représentant le plus primitif;
– les proboscidiens les plus primitifs sont des formes lophodontes, en accord avec leur distribution stratigraphique.
Commentaires des noeuds et de leurs caractères ( Fig. 31 View FIG ). Les caractères homoplastiques sont indiqués par une astérisque * et nous donnons leur indice de rétention IR.
Ocepeia: Dans le cladogramme obtenu, Ocepeia occupe une position basale à côté des euthériens, par contraste avec l’étude initiale qui le rapproche des ongulés lophodontes ( Gheerbrant et al. 2001), i.e. des Altungulata ou des Paenungulata (noeuds 34 ou 33), sur la base de la présence d’un hypolophide (= entolophide). Dans le cladogramme obtenu ici, ce caractère (78) représente ainsi une convergence avec les ongulés lophodontes, et non une synapomorphie, et Ocepeia est exclu des altongulés. Ocepeia est en fait même exclu des Taxeopoda (noeud 35), par contraste avec les réminiscences notables observées avec les phénacodontidés ( Gheerbrant et al. 2001). L’analyse suggère ainsi qu’ Ocepeia est un ongulé archaïque (« Condylarthra »). La connaissance de la denture supérieure d’ Ocepeia reste néanmoins indispensable pour clarifier ses relations phylogénétiques remises en cause ici.
Noeud 35: Taxeopoda
Le clade des Taxeopoda, qui associe phénacodontes et ongulés lophodontes ( Archibald 1998), est soutenu ici par cinq caractères non ambigus, tous homoplastiques.
Un caractère est faiblement homoplastique:
– 77 (1) *: segment lingual de la postcristide (postentocristide) réduit à absent, entoconide et hypoconulide séparés par une nette encoche plus ou moins étroite, segment labial de la postcristide (posthypocristide) bien développé et constant [réversion chez les hyracoïdes]. IR = 77. Ce trait préfigure la structure d’un hypoconulide cingulaire qui caractérise les embrithopodes et les téthythères.
Les autres caractères sont fortement homoplastiques:
– 61 (1) *: p4 submolariforme. IR = 40.
– 68 (1) *: prémolaires et molaires inférieures: cingulum labial présent [réversion chez l’ensemble ( Sirenia , Proboscidea )]. IR = 57.
– 71 (2) *: entocristide réduite à absente [réversion chez Phenacolophus et Phosphatherium ]. IR = 40.
– 74 (1) *: paraconide réduit ou absent [réversion chez Phenacolophus ]. IR = 50.
Le caractère le moins homoplastique (77) suppose néanmoins une réversion chez les hyracoïdes qui nous paraît structuralement peu vraisemblable.
La molarisation des prémolaires (ici 61 (1)) est considérée par Thewissen & Domning (1992: 499) comme un caractère précoce d’un clade voisin (leur « groupe B-C » = (((phénacodontes, meniscothères) altongulés))).
Noeud 34: Altungulata
Ce noeud qui correspond au clade des ongulés lophodontes paraît l’un des mieux soutenus dans la partie profonde du cladogramme, avec 10 caractères non ambigus dont trois non homoplastiques (IR = 100) et deux caractères faiblement homoplastiques (80 (2): IR = 85; 126 (1): IR = 75).
Les synapomorphies uniques sont:
– 120 (1): molaires supérieures: lophes nettement obliques.
– 127 (1) et 128 (1): structure bilophodonte des M1/m1 et des M2-3/m2-3.
Les caractères faiblement homoplastiques sont:
– 80 (2) *: molaires inférieures: hypoconulide reculé, bas et plus décalé labialement par rapport à l’entoconide. IR = 85.
– 126 (1): molaires inférieures bunodonteslophodontes [convergence des embrithopodes]. IR = 75.
Les cinq caractères fortement homoplastiques (IR = 45 à 71) sont:
– 9 (1) *: tubercule du lacrymal présent [réversion chez l’ensemble (embrithopodes, Phenacolophus ), et chez les téthythères]. IR = 50.
– 39 (1) *: symphyse mandibulaire soudée [réversion chez Phosphatherium ]. IR = 50.
– 119 (1) *: molaires supérieures: postprotocrista réduite à absente. IR = 50.
– 122 (1) *: molaires supérieures: racine linguale en cours de subdivision (racine linguale élargie et pourvue d’un sillon vertical médian). IR = 45.
– 125 (1) *: molaires supérieures bunodonteslophodontes [réversion chez les embrithopodes]. IR = 71.
Parmi ces traits très homoplastiques, le plan bunodonte-lophodonte des molaires supérieures (125 (1)) est plus remarquable. Il a un score qui s’approche de celui des molaires inférieures (126 (1)), la différence étant dans la réversion de ce caractère chez les embrithopodes. Les molaires supérieures de ces derniers supposent dans ce cladogramme une réversion considérable sur le plan structural, mais qui est soutenue par la parenté appuyée ici de Phenacolophus , lui plus classiquement bilophodonte ( McKenna & Manning 1977).
Globablement, plusieurs des caractères de ce noeud correspondent à la structure lophodonte (bunodonte-lophodonte) des molaires (125 (1) *, 126 (1) *, 127 (1), 128 (1)) qui fonde classiquement le taxon des altongulés. D’autres traits de ce noeud sont aussi plus ou moins liés à la lophodontie ou son degré d’évolution (80 (2) *, 119 (1) *, 120 (1)).
Noeud 33: Paenungulata
Ce clade, appelé ici Paenungulata car il contient les Hyracoidea , Sirenia et Proboscidea actuels ( Tableau 14, et voir Gheerbrant et al. 2005), est soutenu par six caractères non ambigus dont un caractère non homoplastique et un caractère faiblement homoplastique.
La synapomorphie unique est:
– 89 (1): incisives supérieures grandes. L’agrandissement des incisives inférieures (49 (1)) n’accompagne pas ici celui des supérieures car le caractère n’est pas connu chez les hyracoïdes primitifs et est optimisé de façon ambiguë.
Le caractère faiblement homoplastique est:
– 29 (1) *: périotique: amastoïdie [réversion chez les siréniens, ce qui correspond à la réapparition de la mastoïde dans une fenêtre haut placée entre squamosal et occipital]. IR = 75.
Ces deux caractères sont les plus importants de ce clade. Cependant, une réserve à leur égard tient au fait que chez Phosphatherium les incisives supérieures restent inconnues et que le caractère classique « amastoïdie » est mal visible.
Les caractères très homoplastiques sont:
– 26 (1) *: apophyse post-tympanique développée, méat auditif encore ouvert ventralement. IR = 57.
– 45 (1) *: foramen coronoïde présent [réversion chez Moeritherium ]. IR = 66.
– 63 (1) *: prémolaires inférieures: paraconide élevé. IR = 40.
– 99 (1) *: trois racines chez P2 [réversion chez Phosphatherium et les éléphantiformes]. IR = 5.
Concernant ce dernier trait, l’hypothèse d’un morphotype ancestral de P2 à trois racines chez les Paenungulata est inattendue sur le plan structural, car cela suppose l’évolution secondaire (réversions) de deux racines chez Phosphatherium et les éléphantiformes et d’une racine chez Phenacolophus .
Parmi les caractères ambigus qui peuvent être situés sur ce noeud, on citera la dilambdodontie (124 (1)) (inconnu chez les siréniens et les desmostyliens). L’analyse admet ici une réversion surprenante de la dilambdodontie chez Minchenella et les Anthracobunidae , quoique déjà postulée chez les périssodactyles par Hooker (1989) (voir description du caractère).
Noeud 32: (( Embrithopoda , Phenacolophus ) Tethytheria)
Ce noeud est soutenu par 10 caractères non ambigus, dont deux ne sont pas homoplastiques et cinq sont faiblement homoplastiques.
Les caractères non homoplastiques sont:
– 12 (1): grand foramen infra-orbitaire.
– 97 (1): (d)P1: une racine.
Les caractères faiblement homoplastiques sont:
– 13 (1) *: foramen infra-orbitaire proche de l’orbite, canal infra-orbitaire court. IR = 88.
– 25 (1) *: méat auditif externe sensiblement plus élevé par rapport à la rangée dentaire (proche de la hauteur de l’orbite) [réversion chez Phosphatherium ]. IR = 80.
– 46 (1) *: grandes dimensions dentaires [réversion chez l’ensemble ( Phosphatherium , Khamsaconus )]. IR = 85.
– 77 (3) *: m1-2: régression complète de la postcristide (hypoconulide cingulaire). IR = 77.
– 80 (3) *: molaires inférieures: hypoconulide reculé (cingulaire). IR = 85.
Les caractères très homoplastiques sont:
– 5 (1) *: nasal élevé par rapport au plan dentaire [convergence avec Phenacodontidae ]. IR = 50.
– 9 (0) *: tubercule du lacrymal absent [réversion]. IR = 50.
– 33 (2) *: foramen post-glénoïdien déplacé médialement [réversion chez les siréniens]. IR = 70. La validité de ce caractère dépend d’une hypothèse forte d’homologie primaire entre le foramen post-glénoïdien et l’ouverture ventrale du canalis temporalis.
Parmi les caractères ambigus une autre synapomorphie présente à ce noeud ou au précédent est la présence de grandes incisives inférieures (49 (1)). La position basale des embrithopodes comparativement à l’ensemble des Tethytheria est un des résultats originaux de cette analyse.
Noeud 31: ( Embrithopoda , Phenacolophus )
Ce noeud est soutenu par cinq caractères non ambigus, tous homoplastiques.
Un seul caractère est faiblement homoplastique: – 126 (2) *: molaires inférieures: structure lophodonte vraie. IR = 75.
Parmi les autres caractères, deux participent à la construction lophodonte vraie 76 (1) et 79 (3) qui représente une convergence avec les proboscidiens primitifs (IR = 50). Cette distribution des caractères liés à la lophodontie met en lumière l’homoplasie de cette structure. On notera également qu’une telle parenté de Phenacolophus suppose une réversion de la lophodontie des molaires supérieures des embrithopodes (125).
Noeud 30: Tethytheria
Le clade de Tethytheria incluant Minchenella correspond ici à un noeud faiblement soutenu. Il repose sur seulement deux caractères non ambigus très homoplastiques:
– 84 (2) *: la présence d’un postentoconulide bien développé sur m3. IR = 45.
– 122 (0) *: molaires supérieures: racine linguale non divisée [réversion]. IR = 45.
La présence d’un postentoconulide sur m3 implique des réversions chez les proboscidiens. La réversion supposée ici d’une racine linguale aux molaires supérieures paraît structuralement moins vraisemblable que des convergences dans la division de cette racine linguale ( Radinskya , Perissodactyla , Hyracoidea , Embrithopoda et Proboscidea ).
Noeud 29: ( Anthracobunidae ( Desmostylia ( Sirenia , Proboscidea )))
Ce noeud est soutenu par cinq caractères non ambigus tous homoplastiques. Un caractère est faiblement homoplastique:
– 75 (1) *: molaires inférieures: trigonide court sensiblement pincé mésio-distalement, paracristide réduite. IR = 83.
Les caractères très homoplastiques sont:
– 73 (0) *: molaires inférieures: absence de postmétacristide et métastylide [réversion]. IR = 60.
– 85 (1) *: molaires inférieures: lophes bien transversaux. IR = 66.
– 110 (1) *: molaires supérieures: parastyle réduit à absent [réversion chez ( Phosphatherium et Khamsaconus ) et Numidotherium ]. IR = 66.
– 111 (2) *: préparacrista très réduite ou absente [réversion chez Khamsaconus ]. IR = 66.
La réversion du parastyle (110) dans le groupe (proboscidiens primitifs) admise ici nous paraît plus difficile sur le plan structural qu’une convergence des anthracobunidés, desmostyliens et siréniens. En tant que synapomorphie du noeud 29, 111 (2) n’admet qu’une réversion chez Khamsaconus . Et encore, celle-ci ne concerne – il faut le souligner – que le développement de la préparacrista (il y a jonction du protolophe et du paracône chez Khamsaconus ; voir description du caractère).
Noeud 28: Desmostylia ( Sirenia , Proboscidea ) Ce noeud est soutenu par quatre caractères non ambigus, tous homoplastiques. Le seul caractère faiblement homoplastique est:
– 112 (1) *: molaires supérieures (et dP4): centrocrista réduite ou absente [réversion chez ( Phosphatherium et Khamsaconus )]. IR = 83.
Les autres caractères (59 (1), 69 (1) et 107 (1)), très homoplastiques, ont des indices de rétention très faibles allant de 28 à 37 et ne sont guère significatifs. En fait, même le caractère 112 pose problème. Il admet ici une réversion dans le groupe ( Phosphatherium , Khamsaconus ) a priori peu vraisemblable. Il faut probablement en déduire que le morphotype ancestral de ce trait chez les desmostyliens et les siréniens est là mal connu. C’est aussi le cas du caractère 59 « nombre de racines sur p2 » (voir dans la conclusion de cette partie).
Ce noeud admet aussi plusieurs caractères ambigus (optimisation « deltran ») notables possibles: 23 (1) processus zygomatique du squamosal bien développé latéralement et très robuste; 10 (1) * orbites antérieures; 13 (2) * foramen infra-orbitaire sous l’orbite. Ces traits sont certainement présent à ce noeud: ils sont optimisés de façon ambiguë aux deux noeuds précédents parce qu’ils sont inconnus chez les anthracobunidés et chez Minchenella .
Noeud 27: ( Sirenia , Proboscidea )
Ce noeud qui correspond aux Tethytheria est bien soutenu, par huit caractères non ambigus dont deux non homoplastiques (IR = 100) et trois faiblement homoplastiques.
Les synapomorphies uniques sont:
– 14 (1): fosse sous-maxillaire présente.
– 120 (2): molaires supérieures: lophes plus transversaux.
Les caractères faiblement homoplastiques sont:
– 38 (1) *: symphyse étendue distalement en arrière des prémolaires antérieures [convergence avec les embrithopodes]. IR = 83.
– 115 (1) *: postentoconule présent sur M1 et dP4 [réversion chez Barytherium ]. IR = 83.
– 118 (1) *: molaires supérieures: distocrista différenciée [convergence avec les hyracoïdes]. IR = 87.
Les caractères fortement homoplastiques sont:
– 68 (0) *: prémolaires et molaires inférieures: cingulum labial absent ou réduit [réversion]. IR = 57.
– 116 (1) * et 117 (1) *: postentoconule présent respectivement sur M2 et M3 [réversion chez Barytherium et chez les Deinotheriidae ]. IR = 50. La présence d’un postentoconule (115 (1) *, 116 (1) * et 117 (1) *) apparaît être un des caractèresclefs de ce noeud.
Noeud 26: Proboscidea
Ce noeud, qui associe Phosphatherium à l’ensemble des autres proboscidiens, est l’un des mieux soutenus dans le cladogramme, avec 14 caractères non ambigus dont quatre ne sont pas homoplastiques (11 (1), 31 (1), 47 (1), 56 (1)) et trois faiblement homoplastiques (24 (1) *, IR = 75, 36 (1) *, IR = 80, 126 (2) *, IR = 75). Les sept autres caractères fortement homoplastiques ont des IR qui vont de 33 à 71. C’est le noeud le plus robuste avec celui qui associe les deinothères et les éléphantiformes (noeud 20).
Dans l’arbre de consensus avant pondération ( Fig. 28 View FIG ), le noeud des Proboscidea est soutenu par les mêmes caractères avec une seule différence: le caractère 47 – le nombre d’incisives inférieures, un caractère à états multiples additifs – est homoplastique (IR = 83). L’homoplasie ne touche toutefois que la présence d’une seule incisive par demi-mâchoire (état 47 (2)) et non la présence de deux incisives par demi-mâchoire (état 47 (1)) qui est donc une synapomorphie unique des Proboscidea .
Les états diagnostiques non homoplastiques des Proboscidea sont donc:
– 11 (1): processus zygomatique du maxillaire développé (sous l’orbite et latéralement) et robuste.
– 31 (1): agrandissement de la pars mastoidea du périotique.
– 47 (1): présence de deux incisives inférieures par demi-mâchoire: perte de i3.
– 56 (1): (d)p1 absente.
Il faut toutefois noter que deux de ces traits restent à vérifier: perte de (d)p1 (56 (1)) et de i3 (47 (1)). En effet, l’identification (homologie) de la canine inférieure demande confirmation chez Phosphatherium (alternativement et moins probablement = i3 ou dp1) et le nombre d’incisives reste incertain chez Daouitherium (perte de i3 optimisée). De plus, on ne connaît pas le nombre d’incisives supérieures de Phosphatherium et Daouitherium .
D’autres traits importants faiblement à moyennement homoplastiques sont:
– 24 (1) *: suture squamosal-frontal [convergence avec les périssodactyles]. IR = 75.
– 36 (1) *: foramen optique en position distale proche de la fente sphénorbitaire, les deux alignés sous la crista orbito-temporalis [convergence avec les embrithopodes]. IR = 80.
– 125 (2) *, 126 (2) *: molaires supérieures et inférieures: structure lophodonte vraie [réversion chez les deinothères, ou convergences de la bunolophodontie chez Moeritherium et les éléphantiformes]. 125: IR = 71; 126: IR = 75.
Au plan dentaire, les caractères les plus remarquables pour ce groupe correspondent à la lophodontie vraie (76 (1), 79 (2), 125 (2), 126 (2)), même si ces traits sont homoplastiques. La bunolophodontie (125 (3), 126 (3)) évolue en effet par la suite à partir de ce morphotype, soit parallèlement chez Moeritherium et les éléphantiformes, soit une seule fois chez leur ancêtre commun (les deinothères étant secondairement lophodontes).
Un autre caractère est notable, malgré sa forte homoplasie:
– 81 (2) *: molaires inférieures m1-2: hypoconulide labial. IR = 66. L’homoplasie n’affecte pas en effet l’état 2 – hypoconulide en position labiale – qui caractérise ce seul noeud: c’est une synapomorphie unique des Proboscidea .
L’agrandissement de i1 est un caractère notable de ce noeud au plan structural, mais il apparaît fortement homoplastique avec une réversion chez les proboscidiens avancés ( Moeritherium (deinothères, éléphantiformes)). Celle-ci est toutefois structuralement difficile à envisager.
La topologie étaye un morphotype ancestral lophodonte vrai pour l’ordre des Proboscidea . Par ailleurs, ce noeud semble confirmer le statut non seulement de téthythère mais aussi de proboscidien de Khamsaconus (voir Gheerbrant et al. 1998), mais cela ne repose que sur des optimisations de caractères inconnus chez Khamsaconus . La lophodontie vraie chez Khamsaconus est néanmoins suggérée par la dP4 connue ( Gheerbrant et al. 1998).
Noeud 25: ( Phosphatherium , Khamsaconus ) Phosphatherium , associé à Khamsaconus , est ici le groupe-frère de tous les autres proboscidiens. Ce noeud original fait de Khamsaconus le groupefrère de Phosphatherium , en accord avec leur âge respectif. Il reste cependant très fragile, fondé sur trois caractères dentaires homoplastiques qui sont des réversions. Il s’agit des caractères 46 (0) * et 112 (0) * faiblement homoplastiques (respectivement IR = 85 et 83) et du caractère 110 (0) * très homoplastique (IR = 66). Si la réduction de taille (46 (0) *) ne peut être exclue a priori , la réapparition sur les molaires supérieures d’un parastyle distinct (110 (0) *) et de la centrocrista (112 (0) *) peuvent être expliquées par une mauvaise reconstitution, en l’état actuel des connaissances, du morphotype ancestral des téthythères primitifs (anthracobunidés, desmostyliens et siréniens).
Noeud 24: ( Daouitherium (( Numidotherium , Barytherium ) ( Moeritherium ( Deinotheriidae, Elephantiformes ))))
Deux caractères non ambigus soutiennent ce noeud dont un seul est faiblement homo- plastique:
– 65 (1) *: p4 sub-bilophodonte [réversion chez Moeritherium ]. IR = 75.
L’autre caractère est fortement homoplastique:
– 59 (0) *: p2: 2 racines [réversion]. IR = 33.
Malgré leur homoplasie, ces deux caractères soutiennent ce noeud, quelles que soient les hypothèses de parenté à l’intérieur du groupe comme l’illustrent les Figures 31 View FIG et 28 View FIG . La réversion d’une p2 biradiculée (59 (0)) admise ici est structuralement peu vraisemblable (voir discussion des caractères de Phosphatherium ).
Noeud 23: (( Numidotherium , Barytherium ) ( Moeritherium ( Deinotheriidae, Elephantiformes )))
Ce noeud est soutenu par deux caractères non ambigus, non homoplastiques (IR = 100):
– 53 (1): canine inférieure absente.
– 55 (1): diastème long, au moins entre i2 et p2. Ce sont deux synapomorphies importantes qui confèrent une certaine solidité à ce noeud malgré le faible nombre de caractères. En parcimonie non pondérée ( Fig. 28 View FIG ), l’état dérivé de ces deux caractères est optimisé à la trifurcation qui suit le branchement de Phosphatherium et Khamsaconus , avec réversion chez Daouitherium chez qui ces traits sont présents à l’état 0 (IR = 75). De telles réversions sont toutefois considérables structuralement.
Noeud 21: ( Numidotherium , Barytherium )
La relation de type groupes-frères entre Numidotherium et Barytherium est fondée sur un seul caractère, fortement homoplastique:
– 64 (1) *: prémolaires inférieures: paraconide absent [convergence avec Phosphatherium ]. IR = 50.
Ce noeud reste mal étayé et fragile comme l’est en général l’arrangement relatif des proboscidiens lophodontes. Dans le consensus non pondéré ( Fig. 28 View FIG ) où Barytherium et Daouitherium sont deux groupes-frères, le caractère 64 est optimisé de façon ambiguë en 0 ou 1 chez ( Sirenia , Proboscidea ), chez les Proboscidea , chez ( Khamsaconus , Phosphatherium ), chez les proboscidiens évolués et chez ( Barytherium , Daouitherium ).
À noter ici que Barytherium apparaît notablement divergent au sein des proboscidiens: 12 autapomorphies non ambiguës, mais une seule non homoplastiques (60 (1): quatre racines sur p3-4).
Noeud 22: ( Moeritherium ( Deinotheriidae, Elephantiformes ))
Ce noeud correspond à ce qu’on appelle ici les « proboscidiens avancés ».
Il est soutenu par cinq caractères non ambigus, dont un non homoplastique:
– 51 (1): i2 (incisive latérale) >> i1 (incisive centrale).
Un caractère est faiblement homoplastique:
– 82 (2) *: m1: postentoconulide présent, bien développé. IR = 80.
Les trois autres caractères sont très homoplastiques:
– 32 (1) *: périotique: fenêtre ronde (f. cochleae) et canal cochléaire (cochleae canaliculus) absents, foramen périlymphatique présent [convergence avec les embrithopodes]. IR = 50.
– 50 (0) *: i1 non agrandie [réversion]. IR = 66.
– 107 (2) *: P4: métacône fort, plus ou moins séparé du paracône [convergence avec Taxeopoda]. IR = 37.
La trifurcation correspondant aux proboscidiens avancés dans l’arbre de consensus non pondéré ( Fig. 28 View FIG ) est soutenue par les mêmes caractères qui ont les mêmes indices sauf 107 (2) * dont l’indice de rétention est à peine plus élevé (IR = 50). Ce noeud est donc plus solide que la seule synapomorphie identifiée (agrandissement de l’incisive latérale inférieure, i2) le laisserait supposer. Il convient toutefois de souligner que cette synapomorphie est fondée sur une hypothèse forte d’homologie primaire des incisives inférieures: présence d’une seule paire d’incisives permanentes sur la mandibule des deinothères et des éléphantiformes. À l’inverse, l’agrandissement de i1 caractérise les formes lophodontes primitives.
La bunolophodontie (125 (3), 126 (3)) caractérise également les taxons de ce noeud, mais elle apparaît homoplastique dans le groupe par suite de la lophodontie des deinothères. Il est à noter que selon le strict critère de la parcimonie, la bunolophodontie (125 (3), 126 (3)) partagée par Moeritherium et les éléphantiformes est ou bien une convergence entre ces deux taxons à partir d’une lophodontie ancestrale, ou bien une synapomorphie du noeud « proboscidiens avancés », la lophodontie étant alors une réversion chez les deinothères (autapomorphie). En tout état de cause les caractères 125 et 126 sont optimisés de façon ambiguë en 2 ou 3 (IR = respectivement 71 et 75) au noeud « proboscidiens avancés ».
Noeud 20: ( Deinotheriidae, Elephantiformes ) C’est le groupe le mieux soutenu dans le cladogramme: 15 caractères non ambigus, dont huit non homoplastiques.
Les synapomorphies uniques sont:
– 37 (1): occipital: développement d’une fosse nucale occipitale, associée à une crête nucale médiane pour le tendon nucal.
– 47 (2): une incisive inférieure par demimâchoire.
– 52 (1): une défense à croissance continue (i2).
– 58 (1): p2 absente.
– 103 (1): P3: hypocône présent.
– 108 (1), 109 (1): P4: hypocône présent et morphologie bilophodonte.
– 127 (2): M1/m1: trilophodonte.
Parmi les caractères homoplastiques, citons la présence d’une seule paire d’incisive supérieure permanente (caractère 88 (2), IR = 66), trait non observé chez les deinothères qui n’ont plus d’incisive supérieure. Les fosses nasales reculées (6 (1) *) constituent une convergence avec les siréniens (IR = 50), mais sont sans doute significatives à ce niveau de la hiérarchie du cladogramme.
Les cinq autres caractères (7 (1) *, 35 (1) *, 63 (0) *, 94 (2) * et 122 (2) *) sont fortement homoplastiques (IR de 40 à 62).
Conclusions: apports de l’analyse cladistique de Phosphatherium
Dans l’ensemble les cladogrammes obtenus sont bien résolus, mais notablement homoplastiques. Ils supposent plusieurs réversions importantes difficiles à envisager structuralement et fonctionnellement, et moins probables que des convergences. Cela concerne surtout les caractères suivants:
– 39: réversion de la fusion de la symphyse mandibulaire chez Phosphatherium ;
– 50: réversion de l’agrandissement relatif de i1 chez l’ensemble ( Moeritherium (deinothères, éléphantiformes));
– 59: retour à la présence de deux racines sur p2 chez Phenacolophus et les proboscidiens;
– 77: réapparition de la postentocristide chez les hyracoïdes;
– 110: réapparition du parastyle chez Phosphatherium ;
– 112: réapparition de la centrocrista chez Phosphatherium et Khamsaconus ;
– 122: racine linguale des molaires supérieures non divisée chez les Tethytheria (noeud 30);
– 125: réversion de la lophodontie chez les embrithopodes (molaires supérieures).
Ces réversions considérables soulèvent en retour des questions à la fois sur les relations phylogénétiques impliquées, mais aussi sur certains caractères. Dans certains cas cela peut suggérer alternativement des convergences et/ou un morphotype ancestral mal connu, notamment: 1) chez les téthythères nord-téthysiens et les siréniens (59, 110, 112, 113); et 2) chez les périssodactyles et les paenongulés (77, 125). D’autres traits (50, 122) peuvent mettre en cause certaines des relations obtenues. Par exemple, le caractère 50 (i1 agrandie), qui suppose ici une réversion considérable chez les proboscidiens avancés, s’accorderait mieux avec un clade de proboscidiens lophodontes – dont les relations restent par ailleurs fragiles. Certaines convergences également surprenantes, telles que la structure dilambdodonte talpidienne de l’ectolophe (caractères 124 + 113), posent les mêmes interrogations.
Outre la nature mal connue du morphotype ancestral de certains groupes, une explication simple à toutes ces difficultés réside dans l’échantillonnage taxonomique. Même si le nombre de taxons choisis dans l’analyse est élevé vis-à-vis du problème de la position de Phosphatherium parmi les proboscidiens, il n’en va pas de même pour celles des relations des Altungulata et Taxeopoda. Cette dissymétrie dans les taxons pertinents pour le « haut » et pour le « bas » du cladogramme est certainement responsable des distributions jugées a priori inappropriées de nombreux caractères. C’est pourquoi nous insistons pour que cette analyse soit prise pour ce qu’elle est: l’analyse de la position de Phosphatherium et le test de la monophylie des proboscidiens, des téthythères et des Paenungulata au vu des caractères introduits par l’anatomie désormais mieux connue de Phosphatherium .
Malgré ces problèmes, les cladogrammes obtenus illustrent des parentés supra-ordinales des ongulés lophodontes dont les grandes lignes sont proches des phylogénies issues des études précédentes, même si dans le détail la position de certains taxons n’est pas la même. Il faut souligner notamment la parenté parmi les téthythères primitifs des taxons nord-téthysiens tels que Minchenella , les anthracobunidés et les desmostyliens ( Tassy 1981; Wells & Gingerich 1983; Domning et al. 1986; Shoshani 1986; Tassy & Shoshani 1988; Thewissen & Domning 1992; Fischer & Tassy 1993). On retrouve également la parenté des embrithopodes parmi les paenongulés, et la relation des embrithopodes et de Phenacolophus ( McKenna & Manning 1977) . Néanmoins, l’échantillonnage systématique adopté ici ne permet pas de tester significativement la monophylie des taxeopodes ( Thewissen & Domning 1992; Archibald 1998) et des altongulés ( Prothero et al. 1988; = Pantomesaxonia).
Plusieurs résultats originaux de l’analyse de Phosphatherium méritent d’être soulignés ici. D’une part, c’est la position basale des embrithopodes parmi les paenongulés, comme première branche suivant les hyracoïdes, groupe-frère des téthythères et non des proboscidiens (e.g., Court 1992b; Fischer & Tassy 1993). D’autre part, ce travail semble soutenir le groupe controversé des Paenungulata, en accord avec Novaceck & Wyss (1986) et les résultats des analyses moléculaires. Les caractères de ce clade restent toutefois homoplastiques ou pour certains à vérifier chez Phosphatherium . Enfin, Minchenella , les anthracobunidés et les desmostyliens représentent des branches latérales successives précédant le clade ( Sirenia , Proboscidea ). Les Anthracobunidae sont ainsi écartés ici des Proboscidea et ces derniers représentent un clade strictement africain. La relation mutuelle de ces téthythères primitifs reste toutefois mal étayée et on ne peut exclure que certains forment un clade particulier (e.g., anthracobunidés, desmostyliens; voir Fig. 30 View FIG ). Enfin on notera que l’analyse écarte Ocepeia des Taxeopoda.
L’étude étaye en définitive la monophylie des proboscidiens et la parenté avec eux de Phosphatherium qui est leur représentant le plus primitif. Les caractères archaïques les plus remarquables de Phosphatherium sont résumés dans les Tableaux 12 et 13. Il faut noter que ce cachet primitif de Phosphatherium est encore plus notable pour le crâne que pour la denture qui est comparativement plus avancée, bien plus proche de celle des autres proboscidiens primitifs (e.g., morphologie des molaires).
À côté de ces traits plésiomorphes notables, l’étude met en lumière plusieurs caractères proboscidiens de Phosphatherium . Les plus remarquables sont le développement du processus zygomatique du maxillaire (contribuant à l’ouverture de l’orbite dans le maxillaire), le développement de la pars mastoidea du périotique et l’hypoconulide labial. La perte de i3 et (d)p1 sont deux autres synapomorphies importantes, mais elles restent à vérifier avec l’homologie de la canine inférieure identifiée chez Phosphatherium . Les autres traits proboscidiens de Phosphatherium sont structuralement importants, mais homoplastiques au regard de l’analyse: foramen optique distal (convergence avec les embrithopodes), suture frontal-squamosal (convergence avec périssodactyles), morphologie lophodonte vraie (possible réversion dans l’ordre) et i1 agrandie (réversion dans l’ordre). L’étude de Phosphatherium étaye un morphotype ancestral lophodonte vrai pour l’ordre.
Aucun caractère autapomorphique non ambigu de Phosphatherium ne ressort dans cette analyse. Les traits dérivés les plus remarquables de Phosphatherium au sein des Proboscidea , tels que la cristide obliqua peu oblique (69 (2)) et la p2 uniradiculée (59 (1)), apparaissent en effet homoplastiques. La p2 uniradiculée est interprétée dans le cladogramme comme une synapomorphie avec les desmostyliens et les siréniens, suivie d’une réversion chez les proboscidiens. Mais on peut penser a priori qu’une convergence avec les desmostyliens et avec les siréniens, quoique plus coûteuse, est plus vraisemblable. Au sein des Proboscidea , ce trait n’est connu que chez Numidotherium savagei . La cristide obliqua peu oblique représente, elle, une convergence avec Moeritherium et les éléphantiformes (IR = 28). Deux autres traits notables mais homoplastiques de Phosphatherium sont l’absence de paraconide aux prémolaires inférieures (64 (1) *: convergence avec ( Numidotherium , Barytherium ); IR = 50), et le mésostyle distinct (113 (1) *: convergence avec Phenacodontidae , hyracoïdes (embrithopodes, Phenacolophus ), desmostyliens; IR = 20). Les autres traits singuliers de Phosphatherium sont des caractères ambigus (optimisation « delayed transformation »). Le plus important est le postentoconulide présent à l’état de trace sur m1 (82 (1) *; IR = 80). Ce caractère reste cependant mal connu chez les téthythères et notamment chez les siréniens primitifs. Plusieurs éléments – tels que la répartition du postentoconulide de m3, mais aussi celle du postentoconule – laissent suspecter un caractère plésiomorphe au sein des téthythères (voir description du caractère en Annexe 1).
Le statut de Phosphatherium est intéressant. Si l’on retient l’ensemble des caractères, y compris a m b i g u s – d e l o i n l e s p l u s n o m b r e u x –, l a longueur de la branche menant du noeud 25 ( Phosphatherium , Khamsaconus ) à Phosphatherium peut être estimée de 0 à 35 pas. Cela veut dire que Phosphatherium peut tout aussi bien être tenu pour l’ancêtre de Khamsaconus que pour une forme très dérivée. Une part de l’explication vaut dans le très grand nombre de caractères non observés chez Khamsaconus , tandis que la singularité de Khamsaconus tient à deux réversions très homoplastiques (111 (0) et 122 (0)) peu significatives, pouvant être dues à la mauvaise connaissance des téthythères primitifs (morphotype ancestral des anthracobunidés et des desmostyliens encore mal documenté). D’autre part, la longueur de la branche interne m e n a n t d u m o r p h o t y p e a n c e s t r a l d e s P r o - boscidea au noeud ( Phosphatherium , Khamsaconus ) ne contient que trois transformations non ambiguës, toutes homoplastiques (voir noeud 25). Cela signifie que bien que Phosphatherium n’apparaisse pas comme un ancêtre pour les autres proboscidiens, ses traits dérivés (éventuellement partagés par Khamsaconus ) ne sont pas très significatifs.
Taxeopoda
Altungulata (= Pantomesaxonia)
Paenungulata
Tethytheria
Famille incertae sedis*, Daouitherium Numidotheriidae , Numidotherium Barytheriidae , Barytherium
Elephantiformes
Les relations à l’intérieur des Proboscidea ne sont pas complètement résolues (e.g., analyse non pondérée: Fig. 28 View FIG ). Le cladogramme obtenu après pondération successive fourni un arbre consensus largement résolu ( Fig. 31 View FIG ) qui concorde bien avec la précédente analyse de Daouitherium ( Gheerbrant et al. 2002) . Mais la relation des groupes lophodontes est encore mal établie, aussi bien à l’égard de l’analyse de pondération successive (caractères peu nombreux et essentiellement homoplastiques), que de l’analyse non pondérée (solutions alternatives). Dans le cladogramme issu de la pondération successive ( Fig. 31 View FIG ), les formes lophodontes s’enracinent à la base de l’arbre et les taxons bunolophodontes correspondent aux dernières branches. Les deinothères, groupe-frère des éléphantiformes, font toutefois exception, dans un noeud qui est le plus robuste du cladogramme. Les autres formes lophodontes s’organisent selon une séquence successive de plésions, en accord avec la distribution stratigraphique. A priori , cette topologie des proboscidiens primitifs n’étaye pas l’existence d’un grand groupe lophodonte (hypothèse des Plesielephantiformes Shoshani et al. 2001, ou des Barytherioidea). Toutefois un clade lophodonte ( Numidotherium ( Daouitherium , Barytherium )) ressort dans trois des arbres de l’analyse non pondérée. Ce même clade, qui peut être appelé Barytherioidea par extension du concept de Jaeger (in Mahboubi et al. 1986), apparaît dans l’analyse de pondération successive utilisant le seul indice de rétention (calculé par PAUP 3.1). En outre, les noeuds 24 et 21 du cladogramme examiné ( Fig. 31 View FIG ) sont soutenus par seulement quelques homoplasies. Cela montre que l’arrangement des proboscidiens lophodontes primitifs reste fragile, encore mal connu.
Dans tous les cas Phosphatherium et Daouitherium représentent des lignées bien distinctes appartenant à deux familles différentes. La question est moins tranchée dans le cas de Daouitherium comparativement à Barytherium et Numidotherium dans l’analyse non pondérée ( Fig. 28 View FIG ) et sa position familiale reste incertaine. Un regroupement possible de Numidotherium et Barytherium dans un même clade est suggéré par l’analyse de pondération successive ( Fig. 31 View FIG ). La systématique des ongulés lophodontes et des proboscidiens adoptée en définitive dans ce travail, conforme aux résultats de l’analyse cladistique, est illustrée dans le Tableau 14.
MNHN |
Museum National d'Histoire Naturelle |
PM |
Pratt Museum |
No known copyright restrictions apply. See Agosti, D., Egloff, W., 2009. Taxonomic information exchange and copyright: the Plazi approach. BMC Research Notes 2009, 2:53 for further explanation.
Kingdom |
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Phylum |
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Class |
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Order |
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Family |
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Genus |