Palaeophyllophora tunisiensis Ravel, 2016

Ravel, Anthony, Adaci, Mohammed, Bensalah, Mustapha, Charruault, Anne-Lise, Essid, El Mabrouk, Ammar, Hayet Khayati, Marzougui, Wissem, Mahboubi, Mohammed, Mebrouk, Fateh, Merzeraud, Gilles, Vianey-Liaud, Monique, Tabuce, Rodolphe & Marivaux, Laurent, 2016, Origine et radiation initiale des chauves-souris modernes: nouvelles découvertes dans l’Éocène d’Afrique du Nord, Geodiversitas 38 (3), pp. 355-434 : 368-371

publication ID

https://doi.org/ 10.5252/g2016n3a3

publication LSID

urn:lsid:zoobank.org:pub:FC07ACBE-03F7-414A-BB64-1BB0711766BF

persistent identifier

https://treatment.plazi.org/id/3CDE39AE-900E-41F1-8C68-EE4E6CC5F03F

taxon LSID

lsid:zoobank.org:act:3CDE39AE-900E-41F1-8C68-EE4E6CC5F03F

treatment provided by

Felipe

scientific name

Palaeophyllophora tunisiensis Ravel
status

sp. nov.

? Palaeophyllophora tunisiensis Ravel , n. sp.

( Figs 6 View FIG , 7 View FIG ; Tableau 2)

HOLOTYPE. — Spécimen CBI-1-245, M1 droite, Figs 6B View FIG ; 7 B. View FIG

MATÉRIEL EXAMINÉ. — CBI-2-025 (C1 droite; Figs 6A View FIG ; 7 B View FIG ); CBI-1-246 (M2 droite); CBI-2-024 (M2 gauche; Figs 6C View FIG ; 7 C View FIG ); CBI-2-038 (c1 droite); CBI-2-028 (p2 droite); CBI-2-027 (p2 gauche; Figs 6 D View FIG ; 7D View FIG ); CBI-2-026 (p4 droite); CBI-2-035 (m1/2 droite); CBI-2-029 ( Figs 6E View FIG ; 7 E View FIG ), CBI-2-030 ( Figs 6F View FIG ; 7 F View FIG ), CBI-2-031 ( Fig. 7G View FIG ), CBI-2-032 ( Fig. 7H View FIG ) et CBI-2-034 (m1/2s gauches); CBI-2-036 (trigonide de m1/2 droite); CBI-2-037 (talonide de m1/2 droite); CBI-2-033 (m3 gauche; Figs 6G View FIG ; 7I View FIG ).

ÉTYMOLOGIE. — Le nom de l’espèce fait référence à la Tunisie.

LOCALITÉ TYPE ET ÂGE. — Chambi (CBI) loci 1 et 2, Éocène inférieur terminal-Éocène moyen basal, Djebel Chambi, situé dans la région de Kasserine, Tunisie.

DIAGNOSE. — Espèce caractérisée par l’absence de mésostyle et de postprotocrête sur M1-2. Le protocône de ces mêmes dents est très volumineux. Le cingulum linguodistal rejoint le postcingulum. Le talonide des m1-2 est bien développé, aussi long et large que le trigonide. Cuspides du talonide très espacées cernant un long, large et profond bassin.

DESCRIPTION

CBI-2-025 est une canine supérieure massive, dont la cuspide principale est puissante ( Figs 6A View FIG ; 7 B View FIG ). La face linguale est plate, alors que la face buccale est convexe. Cette dernière est traversée par un sillon de direction mésiobuccale. Le cingulum est développé sur toute la circonférence de la cuspide, et forme deux épais bourrelets (mésio- et distolingual) à la base de la couronne. La partie buccale du cingulum est peu visible (en partie altérée par l’érosion).

Les molaires supérieures CBI-1-246 et CBI-2-024 sont altérées et présentent des structures fortement émoussées. La description des molaires supérieures se focalisera donc sur l’unique spécimen CBI-1-245, en meilleur état de préservation ( Figs 6B View FIG ; 7B View FIG ). Les molaires supérieures sont sub-triangulaires en vue occlusale. Le bord buccal est beaucoup plus long que la partie linguale donnant cet aspect d’amincissement lingual. Le développement transversal est plus marqué chez CBI-2-024 et CBI-1-246 ( Figs 6C View FIG ; 7C View FIG ). Le parastyle de ces deux dents est également moins projeté mésialement mais plus étiré buccalement que chez CBI-1-245. Ces différences semblent être les seuls critères marquants permettant de distinguer une M1 (CBI-1-245) d’une M2 (CBI-2-024 et CBI-1-246).L’ectolophe est très ouvert du fait des crêtes latérales (i.e., préparacrête et postmétacrête) très divergentes. Le mésostyle est absent, une condition singulière qui diffère du patron dilambdodonte courant chez les chiroptères. Le cingulum buccal est assez épais. Il forme une muraille continue qui délimite buccalement une surface d’usure surplombant le paracône et le métacône. Le bord buccal est creusé par un unique ectoflexus très profond. La postparacrête et la prémétacrête sont très courtes et se rejoignent en profondeur pour former une échancrure entre le paracône et le métacône.La postmétacrête est très haute et tranchante. Elle se projette distobuccalement vers le métastyle. La préparacrête est plus courte et plus axée buccolingualement. Elle fait la jonction entre le métacône et le parastyle. Ce dernier est faiblement incurvé en direction de la partie mésiolinguale. Le métacône et le paracône sont très éloignés lingualement de la bordure buccale. Ces deux cuspides sont de taille équivalente. Le paracône est légèrement plus lingual que le métacône. Cette différence est légèrement plus marquée sur CBI-2-024 et CBI-1-246. Le protocône est la structure dominante de la partie linguale de la couronne. Il est conique, très volumineux et pointu. Il se positionne légèrement plus distalement que le paracône. La préprotocrête remonte mésiobuccalement et rejoint un large précingulum. La postprotocrête est en revanche très courte, et ne rejoint aucune autre structure, laissant ainsi une ouverture distale à la protofosse. Les flancs du paracône et du métacône jointifs ne permettent pas une extension buccale de la protofosse. Le cingulum lingual encercle la base du protocône depuis son flanc mésial jusqu’au postcingulum. Le cingulum lingual s’épaissit considérablement dans la région distolinguale pour former sur le talon un bourrelet de forme arrondi.

CBI-2-038 correspond à la base d’une couronne d’une canine inférieure très massive. La robustesse de cette dent semble correspondre avec la canine supérieure décrite ci-dessus (CBI-2-025). La cuspide a été sectionnée.Il est possible malgré tout d’identifier les deux faces du tubercule: une face linguale concave, connectée à un large bassin distolingual, et une face convexe buccale. Les deux faces sont délimitées par une crête distolinguale très fine et une crête distobuccale plus émoussée. Le cingulide est continu mais devient à peine visible dans sa partie la plus buccale.

CBI-2-026 représente une p4 droite. Malheureusement, l’émail de la prémolaire a été fortement altéré, ce qui ne permet pas de faire une description précise du spécimen. La couronne est prémolariforme et possède un contour rectangulaire qui s’amincit vers la partie mésiale (en vue occlusale). Seul le protoconide, dominant et puissant, est présent mais fortement érodé. Le talonide est dominé par un bassin dont l’extension est modérée.

De par la simplicité de la couronne, les spécimens CBI-2- 027 ( Figs 6D View FIG ; 7 D View FIG ) et CBI-2-028 peuvent être attribués ici à des p2s. Leur couronne, de contour ovale en vue occlusale, est munie d’une forte cuspide positionnée mésialement. Deux crêtes sagittales (une mésiale et une distale) s’étendent depuis le somment de cette cuspide et divisent la dent en deux parties (buccale et linguale) quasi symétriques. Un épais cingulide encercle de manière continue la base de la cuspide.

Parmi les molaires inférieures, il n’a pas été possible de distinguer de manière précise les m1s des m2s, soit parce que l’un des deux morphotypes est absent, soit parce que la différence morphologique entre les deux types de dents est ténue. En vue occlusale, le trigonide de ces dents prend la forme d’un triangle quasi équilatéral. Le paraconide, incliné mésialement, est légèrement plus réduit que le métaconide et le protoconide. Le protoconide reste la cuspide la plus volumineuse de la dent. Le talonide est aussi long et aussi large que le trigonide. Cependant le talonide reste significativement moins élevé que le trigonide. L’espacement des cuspides du talonide se traduit par un vaste bassin, qui plus est très profond. L’hypoconide, pincé distomésialement, se situe plus mésialement par rapport à l’entoconide. La longue cristide oblique s’étend depuis l’apex de l’hypoconide jusqu’à la base de la muraille distale du trigonide. L’entoconide, très distal, est petit et peu pointu par rapport à l’hypoconide. L’hypoconulide, légèrement plus réduit que l’entoconide, occupe une position médiane et très distale par rapport à l’entoconide et à l’hypoconide. Il est relié à l’hypoconide et à l’entoconide par la postcristide. Une telle position de l’hypoconulide associée à l’extension de la postcristide, caractérisent une structure nécromantodonte (bien visible sur CBI-2-029; Figs 6 E View FIG ; 7E View FIG ). Les autres molaires présentent un hypoconulide légèrement plus buccal et n’ont pas de crête reliant l’hypoconulide à l’entoconide ( CB2-031 et CB2-032 ; Fig. 7G, H View FIG ). Par ces traits, le talonide de ces dents serait plus d’aspect nyctalodonte. Le cingulide est continu et épais sur toutes les bordures mésiale, buccale et distale de la couronne. La m3 est plus réduite que les m1s et m2s. Le trigonide de m3 diffère du trigonide des m1-2s en ayant une taille plus petite et une forte réduction du paracône et du métacône. Le talonide est également fortement réduit, allongé mais très étroit. Les cuspides associées au talonide ne sont pas identifiables à l’exception de l’hypoconide, lequel est très réduit et déplacé lingualement. Le cingulide de m3 est continu mais il s’amincit fortement au niveau de l’hypoconide .

E F D G

COMPARAISON ET DISCUSSION

L’absence du patron dilambdodonte pour les molaires supérieures est peu fréquente chez les chiroptères. C’est pourquoi l’interprétation taxonomique de ces dents est difficile. Néanmoins, la simplicité structurale de ces molaires, lesquelles sont dépourvues de conule, la projection distolinguale du talon, une divergence des préparacrête et postmétacrête, un développement du cingulum (fort et arrondi), permet d’attribuer ce matériel à un chiroptère. De plus, sur les molaires inférieures associées, la présence d’un épais cingulide continu et le développement et la position de l’hypoconulide renforcent la signature chiroptérienne de ce taxon de Chambi. Plusieurs formes actuelles se caractérisent par une perte totale ou partielle du complexe en «W» de l’ectolophe:

– chez les Phyllostomidae , la plupart des formes ont totalement perdu la dilambdodontie, au profit d’une morphologie plus adaptée au régime frugivore, nectarivore ou hématophage. La forte modification du schéma insectivore chez ces Phyllostomidae ne permet pas d’identifier des similarités avec les fossiles tunisiens;

– au sein des Vespertilionidae , le genre Scotophilus présente une forte modification de l’ectolophe avec un mésostyle fortement diminué et nettement en retrait du bord buccal (parfois effacé par l’usure dentaire), un unique ectoflexus, une postparacrête et une prémétacrête très courtes, ainsi qu’une protofosse absente entre le paracône et le métacône. Malgré un agencement similaire de l’ectolophe, les fossiles tunisiens s’écartent du genre Scotophilus par la projection distolinguale du talon plus prononcée, l’ectolophe nettement plus ouvert, la protofosse ouverte distalement, le talonide plus développé longitudinalement et présentant une structure nécromantodonte. Les molaires supérieures de? Palaeophyllophora tunisiensis Ravel , n. sp. présentent un talon bien développé qui se projette distolingualement, un ectolophe ouvert et une protofosse réduite. Ces caractéristiques sont communes au sein du grand ensemble Rhinolophoidea. Parmi les rhinolophoïdes fossiles, Palaeophyllophora se défini par un ensemble de caractères dentaires dont certains se retrouvent sur les spécimens tunisiens. Le genre Paleophyllophora est attesté dans de nombreuses localités du Quercy depuis le milieu de l’Éocène moyen (MP13, St Maximin) jusqu’à l’Oligocène inférieur (MP23, La Gardiole 3; Revilliod 1917; Sigé 1978; Maitre 2014). Il représente un genre archaïque au sein des Hipposideridae qui se traduit notamment par la présence d’une p3 vestigiale (semblable aux Rhinolophidae ). Les fossiles de Tunisie se rapprochent de cet ensemble Européen par:

– l’aspect robuste de la dentition;

– la présence d’un sillon mésiobuccal sur C1;

– un unique ectoflexus central;

– les postparacrête et prémétacrête très courtes;

– une forte réduction et un retrait lingual du mésostyle;

– un paracône plus lingual que le métacône;

– l’absence d’extension buccale de la protofosse;

– le talonide des m1-2s légèrement plus court que le trigonide; – des molaires inférieures nécromantodontes ou tout du moins présentant un hypoconulide buccalement déplacé par rapport à l’entoconide;

– la réduction du talonide de la m3.

Ces similitudes correspondent pour la plupart aux caractères diagnostiques du genre Palaeophyllophora ( Revilliod 1922) . Les spécimens étudiés ici présentent cependant de fortes divergences également avec les espèces de Palaeophyllophora européennes:

– le bassin lingual de C1 est absent;

– le cingulum buccal de C1 est peu prononcé;

– le mésostyle est absent sur M1-2 (absence du patron dilambdodonte typique);

– le cingulum lingual est très épais, formant un bourrelet projeté distolingualement (surtout sur M1);

– la présence d’une connexion entre le postcingulum et le cingulum lingual (structure continue);

– une très courte extension de la postprotocrête, laissant une ouverture distale à la protofosse;

– le protocône est moins massif mais relativement plus élevé; – les molaires inférieures sont légèrement plus allongées;

– l’hypoconide occupe une position plus buccale.

La pauvreté du matériel ainsi que les divergences énoncées ci-dessus ne permettent pas d’assigner de façon formelle ces nouveaux fossiles des localités du Chambi au genre Palaeophyllophora . Toutefois, les caractères diagnostiques des Palaeophyllophora observables sur les spécimens du Chambi dénotent une probable affiliation avec le genre européen. Certains caractères comme la morphologie du cingulum lingual, la projection du talon, le talonide plus développé et la proportion du protocône se rapprochent plus des formes primitives telles qu’ Icaronycteris et Archaeonycteris . Ces similitudes sont peut être la conséquence de l’ancienneté de? P. tunisiensis Ravel , n. sp. qui aurait soit conservé certains traits plésiomorphiques des chiroptères, soit développé des convergences précoces avec les formes primitives.

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