Cynorkis pleiadea (Frapp.) Schltr.

Pailler, Thierry, Lavergne, Véronique, Catan, Laurent, Vandeschricke, François, Flores, Olivier, Mallet, Bertrand, Baider, Cláudia & Bytebier, Benny, 2022, Révision taxonomique de douze espèces du genre Cynorkis Thouars (Orchidaceae, Habenariinae) de La Réunion, basée sur une approche morphologique et écologique, Adansonia (3) 44 (25), pp. 331-344 : 339-340

Cynorkis pleiadea (Frapp.) Schltr.

( Fig. 1 A-I)

In Beihefte zum Botanischen Centralblatt 33 (2): 401 ( Schlechter 1915). — Hemiperis pleiadea Frapp. in Cordem., Flore de l’Île de La Réunion: 243 ( Cordemoy 1895).

— Type: France. La Réunion, Sentier Dos d’Âne-Plaine des Chicots , 12.IV.1978, Bosser 22481 (néo-, P [ P00693059 ], désigné ici) .

Cynorkis crispa (Frapp.) Schltr., Beihefte zum Botanischen Centralblatt 33 (2): 399 ( Schlechter 1915). — Hemiperis crispa Frapp. in Cordem., Flore de l’Île de La Réunion: 241 ( Cordemoy 1895), syn. nov.

— Type: herbier J.M.C. Richard, non trouvé .

Cynorkis simplex (Frapp.) Hermans & P.J.Cribb, Kew Bulletin 72 (38): 28 ( Hermans et al. 2017). — Hemiperis simplex Frapp. in Cordem., Flore de l’Île de La Réunion: 248 ( Cordemoy 1895), syn. nov. — Arnottia simplex (Frapp.) Schltr., Beihefte zum Botanischen Centralblatt 33(2): 398 ( Schlechter 1915).

— Type: herbier J.M.C. Richard, non trouvé .

Cynorkis ludens (Frapp.) Schltr. , Beihefte zum Botanischen Centralblatt 33 (2): 401 ( Schlechter 1915). — Hemiperis ludens Frapp. in Cordem., Flore de l’Île de La Réunion: 239 ( Cordemoy 1895), syn. nov.

— Type: aucun spécimen d’herbier cité par Cordemoy .

Cynorkis globulosa (Frapp.) Schltr. , Beihefte zum Botanischen Centralblatt 33 (2): 400 ( Schlechter 1915). — Hemiperis globulosa Frapp. in Cordem., Flore de l’Île de La Réunion: 249 ( Cordemoy 1895), syn. nov.

— Type: aucun spécimen d’herbier cité par Cordemoy .

Cynorkis brachycentra (Frapp.) Schltr., Beihefte zum Botanischen Centralblatt 33 (2): 399 ( Schlechter 1915), nom. illeg. — Hemiperis affinis Frapp. , Orchidées de l’Île de La Réunion: 11 ( Frappier 1880), nomen nudum. — Hemiperis brachycentra Frapp. in Cordem., Flore de l’Île de La Réunion: 250 ( Cordemoy 1895), syn. nov.

— Type: herbier J.M.C. Richard, non trouvé .

DISTRIBUTION/ÉCOLOGIE. — Endémique de La Réunion. Cette espèce se développe au sein de la forêt de nuages, à des altitudes comprises entre 1000 et 2000 m ( Fig. 4A, B ). Elle a été observée à la Plaine d’Affouches, à la Plaine des Fougères, à l’Entre-Deux, à la Plaine des Palmistes, à Cilaos, à Salazie, et au Tampon.

STATUT DE CONSERVATION. — L’espèce est peu commune et se trouve exceptionnellement sous forme de populations dépassant 10 individus. L’étendue de l’occurrence (EOO) de cette espèce est de 743 km 2 et l’aire d’occurence (AOO) de 44 km 2 (calculées à l’aide de GeoCat, Bachman et al. 2011). L’habitat originel de cette espèce est les sousbois clairs des fruticées à Erica reunionensis E.G.H. Oliv. (Ericaceae) ainsi que les talus ensoleillés des forêts de montagne, le plus souvent dans les tapis de bryophytes. Ces milieux subissent une forte pression d’invasion biologique principalement par deux espèces exotiques envahissantes ( Ageratina riparia (Regel) R.King & H.Rob. , Asteraceae et Hedychium gardnerianum Sheppard ex Ker Gawl. , Zingiberaceae ). Ces espèces exotiques envahissantes entrent en compétition pour la lumière et les ressources du sol, même si 50 % des types de végétation, où l’espèce est présente, sont relativement intacts ou ont un faible degré d’invasion ( Fenouillas et al. 2021). Sur la base de la répartition des espèces qui comprend des sous-populations disjointes avec peu d’individus, l’espèce devrait être considérée comme EN C2a selon les catégories et critères de la Liste rouge de l’UICN (UICN 2001).

MATÉRIEL ÉTUDIÉ. — La Réunion. s.d., Delteil s.n. (P[ P00693020 , P00693054 ]) ; Bélouve, 2000 m, 01.IV.1956, Bosser 9467 (P[ P00693050 ]) ; Plateau Bébour ,IV.70, Bosser 20069 (P[ P00693055 ]) ; Ilet Patience , 1400 m, 01.III.1978, Friedmann 3401 (P[ P00693034 ]) ; Morne des Patates à Durand , 1000 à 1100 m, 05.IV.1978, Bosser 22453 (P[ P00693058 ]) ; Ilet Patience , 1500 m, 07.IV.1978, Bosser 22459 (P[ P00693144 ]) ; Sentier Dos d’Âne-Plaine des Chicots , 12.IV.1978, Bosser 22481 (P[ P00693059 ]) ; Plaine des Chicots , 1200 m, 01.V.1981, Cadet 6246 (REU[ REU017505 , REU007358 ]) ; Cilaos, Piton Bleu , 1250 m, IV.2021, Pailler s.n. (REU[ REU024568 ]) .

DESCRIPTION

Herbe pérenne, dressée, entièrement glabre, haute de 20,02 ± 7,58 (8,5-40,0) cm.Tubercules 1-2, oblongs, pileux.Feuilles 1-2, basales, plus ou moins étalées, ou dressées, ovales à elliptiques, à apex aigu, arrondies ou un peu rétrécies à la base, 4,39 ± 2,68 × 1,46 ± 0,40 (2,0-13,0 × 0,7-2,8) cm pour la première, 3,41 ± 1,81 × 1,16 ± 0,35 (2,0-9,0 × 0,6-1,7) cm pour la seconde, charnues, lisses, embrassantes. Hampe florale grêle, verte, lavée de violet ou entièrement violette; bractées stériles 2-4, acuminées. Grappe lâche, parfois unilatérale, portant 7,50 ± 0,90 (3,0-15,0) fleurs assez espacées; bractées florales aiguës, plus courtes que l’ovaire. Sépales blancs à blanc rosé avec parfois l’extrémité verte ou des nervures vertes, le sépale médian plus rose à l’extérieur; pétales blancs à blanc rosé taché de points fuchsia; labelle blanc avec quelques grosses taches fuchsia. Ovaire 10,8 ± 1,7 (9,0-15,0) mm vert ou violacé, papilleux. Sépale médian ovale, naviculaire, aigu, 4,5 ± 0,3 × 2,1 ± 0,3 (4,0-5,0 × 1,5-2,5) mm, 3-nervé. Sépales latéraux obliquement ovales, obtus, dissymétriques, 5,4 ± 0,6 × 2,8 ± 0,3 (5-7 × 2,5-3) mm, 2-3-nervés. Pétales obliquement ovales, obtus, dissymétriques, 4,7 ± 0,4 × 2,7 ± 0,4 (4,0-5,5 × 2,0-3,5) mm, 2-3-nervés, dressés et cohérents avec le sépale médian pour former un casque au-dessus du gynostème. Labelle étalé, obovale à spatulé, à marge parfois crispée ou ondulée, 1-3-lobé, 5-7-nervé, 7,0 ± 0,7 × 5,3 ± 1,6 (6,0-8,0 × 3,0-8,0) mm; éperon absent, ou gibbeux, ou très court, ou long de 4-5 mm et dans ce cas courbe à extrémité renflée ou bifide et nectarifère. Colonne longue de 1,5 mm; rostelle en lame plane, échancré et trilobé à l’avant; staminodes représentés par des masses latérales blanchâtres; stigmates 2, peu exserts sous le rostelle. Ovaire papilleux, un peu courbé au sommet, rétréci aux deux extrémités, trigone.

NOTE

Une planche de Madame Eudoxie de Cordemoy, légendée « Cynorkis pleiadea » et appartenant à la collection de l’Herbier National de Maurice (MAU) est désignée comme lectotype par Hermans & Cribb (2021). Or cette planche représente clairement C. trilinguis , dont le lectotype disséqué et identifié par Jean Bosser et désigné par Hermans & Cribb (2021) se trouve à P (P00541671). En effet, quelques différences majeures permettent de différencier les deux espèces sur la base de leurs descriptions par Frappier et des spécimens associés. Frappier écrit que C. pleiadea possède «un éperon filiforme [...] ordinairement arqué, et obliquement bifide à l’extrémité» ( Cordemoy 1895: 243) alors que Cynorkis trilinguis possède un «éperon sacciforme, obconique» ( Cordemoy 1895: 243). Il décrit C. pleiadea comme ayant un labelle «[...] sensiblement trilobé à lobe intermédiaire large obtus crispé et comme rongé à la crête » ( Cordemoy 1895: 243), alors que Cynorkis trilinguis possède un labelle «profondément 3-fide, à lobes divergeant en éventail,linguiformes, l’intermédiaire plus long, tous obtus [...] » ( Cordemoy 1895: 242, 243). Les caractéristiques concernant C. pleiadea apparaissent clairement sur le spécimenP00693059, qui peut être désigné comme néotype. La description de la forme du labelle et de celle de l’éperon de Cynorkis trilinguis est conforme à la dissection du spécimen P00541671 et au dessin de Madame Eudoxie de Cordemoy (identifié sur la planche comme étant Cynorkis pleiadea ) qui représentent tous deux Cynorkis trilinguis . Hermans & Cribb (2021) ont placé C. ludens en synonyme de C. constellata . Cependant, pour les raisons invoquées plus haut au niveau de la structure des populations de C. pleiadea , nous plaçons içi C. ludens en synonyme de C. pleiadea . Nous n’avons trouvé aucun specimen de C. globulosa , qui a été décrit à partir d’un seul échantillon connu de l’herbier de Frappier (et non vu par Cordemoy), et par un specimen vu vivant par Cordemoy ( Cordemoy 1895: 236). C’est la seule espèce qui n’ait jamais été retrouvée dans la nature, et selon la description, nous pensons qu’il s’agit d’une forme rare de C. pleiadea .

Figures

FIG. 1. — Variation de la morphologie de l’éperon et du labelle chez Cynorkis pleiadea et correspondance avec 5 espèces décrites par Frappier in Cordemoy (1895): A, B, Hemiperis simplex Frapp.;C, D, Hemiperis crispa Frapp.;E, F, Hemiperis brachycentraFrapp.;G, H, Hemiperis pleiadeaFrapp.;I, Hemiperis ludens Frapp. Tous les individus photographiés proviennent d’une même population (Entre-deux, 1200 m). Photos de Véronique Lavergne.

FIG. 4. — A, Distribution altitudinale de Cynorkis pleiadea (Frapp.) Schltr. (barres blanches, N = 23) et Cynorkis constellata (Frapp.) Schltr. (barres noires, N = 67); B, distribution géographique de Cynorkis pleiadea (Frapp.) Schltr. (points blancs) et Cynorkis constellata (Frapp.) Schltr. (points noirs) à La Réunion.