Mugil, Linnaeus, 1758, Linnaeus , 1758

M. Cuvier & M. Valenciennes, 1836, Histoire Naturelle des Poissons, Vol. 11 - De la famille des Mugiloides, Paris, Strassbourgh, Bruxelles: F. G. Levrault : 7-18

publication ID

https://doi.org/ 10.5281/zenodo.11488706

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https://doi.org/10.5281/zenodo.11507216

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Mugil
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Des Muges View in CoL ou Mulets.

Nous venons d’établir que les muges sont des acanthoptérygıens à ventrales situées Sous Pabdomen, à deux dorsales distınctes et même très-séparées, quı, par leur forme générale et par leurs grandes écailles, ont quelque chose de l'apparence extérıeure de nos cyprıns, surtout de nos chevaines ou meuniers. Leur bouche est petite, fendue en travers au bout du museau et légèrement pliée dans son milieu, 0ù la lèvre inférieure a une protubérance qui répond à une échancrure de la supérieure; leurs dents sont ınfinıment petites et déliées, souvent même à peu près imperceptibles; de chaque coté de leur museau est un sous-orbitaire finement dentelé, sous lequel un maxillaire grêle s'abrite plus ou moins complétement; leurs opercules sont larges et bombés latéralement, parce qu'ils renferment, outre les branchies, un appareil pharyngien assez compliqué, qui ne laisse arriver dans Pœsophage que des matières liquıdes ou déliées, en les faısant passer par une voıe très-contoumée. Leur estomac se termine en une espèce de gésier charnu, qui a quelque rapport avec celui des oiseaux; leurs appendices pyloriques sont en assez petit nombre, maıs leur intestin est long et replié.

Dépourvus d’armes offensives, les muges, malgré la grandeur à laquelle atteignent plusieurs de leurs espèces, ne peuvent attaquer les autres poissons, et même ils n’ont guère pour s'en défendre que les épines de leur première dorsale, trop menues et trop peu nombreuses pour être bien redoutables. Ils ont, au contraire, pour ennemis la plupart des poissons voraces, mais spécialement, d'après M. le prince de Musignagno, le perca labrax.

Muge, mugeo, mu j on, sont leurs noms provençaux les Espagnols prononcent mugel; sur le golfe de Gascogne on les nomme meuille, d”où l’on a fait sur les côtes de la Manche mulet, et en anglais mullet.- Toutes ces dénominations rappellent celle de Mugil‘, qu’ils portaient en latin, et l'on voit par la comparaison des passages empruntés des Grecs par les Latins, ou réciproquement, qu’en grec on les nommait xeegeóg.

Le sens de ces deux expressions se constate~ par tout ce que les anciens rapportent de la frugalité de ces mugils ou Cestreus, par tout ce qu’ils disent de leur naturel pacıfique, de leur habileté à sauter hors des filets, de Yabondance avec laquelle ils se portent en certaines saisons aux embouchures des fleuves, ou vers les lacs et les étangs qui communiquent avec la mer; car, du reste, on ne trouve ni dans Aristote, nl dans ses successeurs, aucune indication tırée de leur conformation, et qui eût pu les faire reconnaître, sl leur nom n'eı^ıt pas mis sur la voie, et sl ce que l’on saıt de leurs habitudes, ne se fût pas trouve' assez conforme avec ce que les écrivains en racontent.

Les anciens Grecs disunguaient déjà plusieurs espèces de muges. Ans [Z tote 0126 ‘ nomme dans le genre des Cestreus les chalones ou chélones, les myxons, les céphales.

Dans un autre passage ‘ il présente le céphale et le cestreus comme deux espèces du même genre, et à quelques lignes de 1à il dit que le céphale qui se tient près du rivage, est nommé par quelques-uns clıelon, et qu'un autre céphale, vivant loin du rivage, ne se nourrit que de son propre mucus, ce qui semble indiquer le myxon; aınsı dans ce dernier endroit c’est eeoeziee qui est le nom générıque.

Au contraire, Hicesius, dans Athénée ", fait des cestreus, alnsl que des céphales, des chélones et des myxzns, autant d'espèces de leuczscus, tandis qu'Euthydemus y divise les cestreus en spheneus, en dactylus et en céphales 3,- et que, selon Polémon, il y en avait que 1’0n nommait plates,° variations qui prouvent seulement que dans ces temps-là les nomenclatures populaires nlétaient ni plus régulières ni plus fixes que du nôtre; mais quoıqu°à en juger par 'les nombreux passages d'Aristote 4, 0ù il emploie toujours le mot de nscrrgsôs chaque fois qu'il parle des muges en général, cette dénomination paraisse être celle qui était de son temps l'expression générique, le céphale était Yespèce la plus connue, et dest celle dont le nom revıent le plus souvent avec des détails sur les singularités de ses mœurs. Ce nom avait même fini par remplacer entièrement celui de cestreus1, et chez les Grecs modernes il est constamment le nom générique.

Non-seulement il n'était pas facile de retrouver ces divers muges, mais la grande ressemblance que les espèces de ce genre ont entre elles, rend en général leur distinction un des problèmes les plus difficiles de l'Ichthyologie.

Bélon n'en reconnaissait qu'une espèce, quoique déjà la liste qu'il donne des differences observées par les habitans des bouches du Pô, et des noms par lesquels ils les désignent ', eût pu lui suggérer dautres idées.

Rondelet, après s’en être long-temps occupé et avoir consulté les pêcheurs, en distingua quatre, qui existent bien réellement dans la Méditerranée; mais il indiqua leur caractère d'une manière si vague, et en donna des figures si peu soignées, que Willughby ne cmt pas devoir en admettre les différences comme spécifiques1. Artedi, trop souvent écho fidèle de Willughby, et Linné, adhérant dbrdinaire aux idées d'Arted'r, adoptèrent cette opinion. Ce dernier réunit tous les muges de l'Europe sous le nom commun de mugil cephalus, et leur assigna même, tou}ours sur l'autorité de Willughby, suivie par Artedi2, un caractère sans exactitude, celui de cinq rayons à la premiere dorsale, qu’0n n'observerait peut-être pas dans un individu sur cinquante, et dont nous n'avons rencontré dans toutes nos recherches qu'un seul exemple, et encore accidentel. L'excellente description de M. le prince de Musignagno confirme également ce fait, et enfin, ce qui prouve que ce nombre cinq est tout-à-fait accidentel, dest que l'auteur dont nous invoquons ici le témoignage, l’a observe’ sur le céphale, tandis que dest le mugil capito seul qui nous a offert cet exemple.

Cependant l'autorité de Linné prévalut, et pendant très-long-temps les naturalistes n’0nt placé dans leurs méthodes, comme espèce de nos mers, que ce seul mugil cephalus avec ses prétendus cinq rayons dorsaux, en lui opposant le mugil albula de l'Amérique septentrionale, distingué de l'autre parce qu'il n'en aurait que quatre.‘

Cetti 2, en 1 778, reprodulsit l'idée de quatre espèces que les pêcheurs de Naples lui avaient montrées le cefalo, qui est plus grand et a la tête plus grosse; l'ozzone, qui a la tête plus aigue et ne fait qu'un saut vertical, la tumula ou lissa, quı tourne en l’air en sautant, et la concadita, qui atteint à plus de deux livres et faıt plusieurs sauts obliques, 'comme ces pierres auxquels les enfans font faire des rıcochets.

Les pêcheurs de Gênes, ajoute-t-il, lui en firent voir trois espèces ° le noir, la grosse tête et le sauteur; maıs il avoue que ni pour les uns ni pour les autres il n’a pu découvrir de caractères.

Feu M. De Laroche, en 1809, en distingua deux à Iviça et en fit représenter les têtes dans les Annales du muséum d'histoire naturelle, t. XIII, le premier, pl. 20, fig. 4, nommé à Iviça mugel, est notre céphale, le second, pl. at, fig. 7, nommé lisa, est notre muge à grosses lèvres. M. De Laroche n'en fait que des variétés du mugil cephalus.

M. Risso, instruit par les pêcheurs de Nice, en a indiqué quatre espèces et deux variétés‘, qu’il a ensuite érıgées en espèces 2, et a essayé de les caractériser; mais ses différences, prises des nuances de couleurs d'aille urs fort semblables, ou de quelques autres traits peu sensibles, n'auraient peut-être 'pas convaincu les naturalistes plus que n’avalent fait les observations antérieures de Rondelet.

M. Rafinesque3 se borne à rappeler les noms déjà employés par Iauteur de Montpellier, mais ne considère les poissons qui les portent, que comme des variétés d'une espèce unique.

J e trouve dans un prodrome d'observations ichtliyologiques de M. del Nardo, imprimées dans l’Isls de M. Oken 1, que les pêcheurs de Chıoggıa distinguem cinq sortes de muges, dont M. del Nardo ne fait non plus que des varlétés. Une partie de leurs noms: cievoli, botoli, canestri, cortegano, boreghe, vergelate, rentre dans ceux que Bélon avait déjà mentıonnés. Le cıevolo, dit l'auteur, est 1è premier de ceux de Laroche, le buosega son second; par conséquent notre céphale et notre muge à grosses lèvres.

M. de Martens2 rapporte aussı à peu près les mêmes noms, et attribue les differences à Pâge; les plus petits, jusqu'à un empan, ditil, se nomment bottolo, un peu pl us grands, on les appelle caostello, verzelata et destregan ;; au P poids d'une livre 7, ceolo ou cievolo; enfin, depuis deux livres jusqu'à quatorze, qui est la plus grande masse qu'ils acquièrent, bo - sega et volpina. Ces noms, ajoute-t-il, sont déjà anciens une charte du quinzième siècle parle des cefalis, listriganis. et verzellatís.

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Si nous avons eu plus de succès dans la recherche de caractères posıtıfs et vraiment spécífiques, nous l’avons dû d’abord au zèle généreux de M. Savigny, qui a recueilli et déposé au Cabinet du Boi une collection des poissons de la Méditerranée, non moins remarquable parle nombre des objets, que par les soins éclairés que ce savant naturaliste a mis à les choisir.

Pour ce qui concerne les muges en particulier, il a consulté personnellement M. Risso, afin de bien s'assurer qu’il possédait les mêmes espèces. Nous avons] oint à cette collection des individus que M. Cuvier avait recueillis lui-même autrefois en Italie; ceux que M. Delalande nous avait apportés de Marseille; ceux que M. Banon nous a envoyés de Toulon; ceux que M. Biberon nous a récemment apportés de Sicile. Nous leur avons comparé les difïérens muges que Yon vend sur le marché de Paris, et ceux qui se pêchent sur quel- l ques-unes de nos côtes de l`Océan, notamment sur celles de Picardie 7, 0ù M. Baillon ° nous les a recueillis, et sur celles de YAunıs, d'ou elles nous ont été envoyées par M. d’Orbigny. C' est ainsi que nous avons pu assigner avec précision les nuances légères de forme qui en marquent la séparation, et qui ne laisseront plus désormais de doute que les seules mers de France en possèdent jusquà six ou sept espèces parfaitement distinctes.

Cest un extrait de ce grand travail qui a été publié par M. Cuvier dans la seconde édition du Règne animal. Il y détermine, par des caractères très-précis, les six espèces de muges les plus abondantes dans la Méditerranée et les plus faciles à reconnaître; aussi les naturalistes qui ont écrit après s'être éclairés par ces travaux, ont-ils tous admis nos déterminations.

M. le prince de Musignagno1, qui a parfaitement bien représenté toutes nos espèces de la Méditerranée, a fort bien su les reconnaître d'après notre nomenclature et a en quelque sorte justifié l'exactitude de caractères. Nous citerons tout à l°heure les travaux de MM. Nilson et Yarell quand nous traiterons des muges de l'Ocean.

Ce qui est singulier, c'est que dans les longues descriptions qu'Artedi, Brunnich, Pennant, Bloch, Pallas, etc., ont données de leurs muges, et même dans leurs figures, ils se sont tellement attachés aux caractères communs et génériques, et ont fait si peu d'attentlon aux détails, d'où l'on tire les différences spécifiques, qu’il est à peu près impossible aujourdhui de savoir quelle espèce chacun d’eux avait sous les yeux.

Un mot de Linné me fait croire cependant que le sien n'était pas le vrai céphale; il dit dans le caractère générique ' denticulus inflexus supra sinus oris, expression que Shaw a changée en callus, et quı ne peut se rapporter qu'à cette extrémité recourbée du maxillaire, qui paraît en arrière de la commissure dans plusieurs espèces, mais que justement on ne voit pas dans celle-là.

D'ailleurs Linné a travaillé sur l'ichthyologie en grande partie d'après les matériaux d`Artedl, et celuı-cı dit positivement dans la longue description du Mugil cephalus, oculi... nulla cute communi tecti. expression qu'il n'aurait certainement pas employée s’il eût examiné ' les yeux du ll. vrai céphale.

Nous allons donc essayer de suppléer à cette mattention. mais pour le faire avec méthode, nous décrirons dabord comparativement les muges de la Méditerranée; nous tâcherons de les rapporter aux indications qu'en ont données les anciens; nous constaterons ce qu’il y a de plus certain sur leurs habıtudes et sur leurs propriétés; passant ensuite sur les côtes de l'Océan, nous reconnaîtrons ceux d'entre eux qui y existent aussi, et nous donnerons la description de ceux qui sont propres à cette mer. C’ est alors seulement que nous pourrons avec succès nous transporter dans les parages plus éloignés, et y signaler soit nos espèces lorsque nous les y rencontrerons, soit les espèces plus ou moins différentes que la nature y produit.

Kingdom

Animalia

Phylum

Chordata

Order

Mugiliformes

Family

Mugilidae

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