Cuvierina Boas, 1886

Rampal, Jeannine, 2002, Biodiversité et biogéographie chez les Cavoliniidae (Mollusca, Gastropoda, Opisthobranchia, Euthecosomata). Régions faunistiques marines, Zoosystema 24 (2), pp. 209-258 : 212-214

Genre Cuvierina Boas, 1886

ESPÈCE TYPE. — Cuvierina columnella ( Rang, 1827) .

ESPÈCES INCLUSES. — Cuvierina urceolaris ( Mörch, 1850) ; Cuvierina columnella ( Rang, 1827) ; Cuvierina spoeli n. sp. À l’origine ont été décrites deux espèces: Cuvierina columnella ( Rang, 1827) et Cuvierina urceolaris ( Mörch, 1850) , assimilées à des sous-espèces depuis plusieurs décennies ( C. columnella columnella [ Rang, 1827], C. columnella urceolaris [ Mörch, 1850]). Les caractéristiques morphologiques et biogéographiques de ces deux taxons nous autorisent à leur redonner un rang spécifique: Cuvierina columnella ( Rang, 1827) et Cuvierina urceolaris ( Mörch, 1850) . Nous procédons de même pour un troisième taxon infraspécifique Cuvierina columnella forma atlantica Spoel, 1970. Ce nom n’étant pas valide car non conforme au Code international de Nomenclature zoologique ( ICZN 1999), ce taxon ne peut être attribué à Spoel en tant qu’espèce. Nous le redécrivons et le nommons Cuvierina spoeli n. sp.

Nous présentons une nouvelle méthode d’analyse de la largeur maximum (lm) de la coquille. Les bords de la coquille étant presque parallèles sur une certaine longueur, la largeur maximum ne variant donc pas de façon sensible (excepté chez C. urceolaris , car sa coquille est très bombée), nous évaluons la position et la longueur de l’arc de cercle (E) pour laquelle la largeur maximum est presque constante (variation ne dépassant pas quelques 1/ 100 mm). Ce paramètre (E), exprimé en % de la longueur totale de la coquille (L), matérialise le parallélisme des bords de la coquille. Nous avons aussi évalué la longueur moyenne qui a une forte valeur discriminante ( Tableau 1). D’autres paramètres ont été mesurés, à savoir: hauteur et largeur du péristome, et largeur au niveau de la cicatrice de la coquille juvénile, mais leurs différences ne sont pas significatives. Cette étude est basée sur l’examen de plus de 350 spécimens récoltés dans les océans Atlantique, Indien, Pacifique, l’archipel indoniésien, le canal de Mozambique et en Méditerrannée ( Fig. 1C ).

Cuvierina urceolaris ( Mörch, 1850) ( Fig. 1 )

Cuvieria urceolaris Mörch, 1850: 19 .

MATÉRIEL EXAMINÉ. — 200 spécimens (24°31’S, 38°07’E; 07°47’S, 51°51’E; 01°18’S, 49°21’E; 21°08’S, 55°11’E; 12°38’S, 45°11’E; 12°29’S, 45°02’E; 33°21’S, 2°40’E; 17°15’N, 145°44’O; 01°14’S, 169°49’E; 01°48’S, 169°43’E; 02°27’S, 169°38’E; 04°00’S, 169°45’E; 22°29’S, 166°24’E; 00°14’S, 117°51’E) .

DISTRIBUTION. — Cuvierina urceolaris est une espèce tropicale typiquement indo-pacifique ( Fig. 1C ). Nous l’avons fréquemment récolté dans le Pacifique occidental et abondamment dans les sédiments du Pacifique centre-équatorial; il a été signalé aussi dans la partie nord-orientale de cet océan, près de San Francisco mais de façon sporadique (Tesch 1948). Dans l’océan Indien, nous l’avons récolté d’est en ouest, parfois associé à C. spoeli n. sp. Une étude systématique effectuée par Sakthivel (1976) sur l’ensemble de cet océan et en mer Rouge a montré que le genre Cuvierina y est peu

A fréquent, peu abondant, sauf exceptions, et réparti de façon hétérogène. Il peut aborder l’Atlantique sudafricain à la faveur des courants.

REMARQUES

C’est le plus petit (L = 5,30-6,90 mm; moyenne 5,86 mm), relativement le plus large (lm/L = 0,39-0,40) et le plus bombé des Cuvierina (E = 5,5 %) ( Tableau 1). Parmi les spécimens examinés, ceux de l’archipel indonésien et du Pacifique centre-équatorial sont les plus trapus. Les variations de la longueur ne semblent pas caractéristiques d’un secteur mais les spécimens les plus grands ont été observés dans le Pacifique occidental. L’arc de cercle correspondant à l’étalement de lm est postérieur au milieu de la coquille ( Fig. 1B ). En valeur relative, la largeur et la hauteur du péristome ainsi que la largeur au niveau de la coquille juvénile sont un peu supérieures à celles des deux autres espèces, mais les différences ne sont pas significatives alors que les précédents caractères l’opposent nettement aux deux autres Cuvierina et permettent d’élever ce taxon au rang spécifique. Sa présence dans les mêmes stations que les espèces suivantes, sans trace d’hybridation, confirme son statut spécifique.

Cuvierina columnella ( Rang, 1827) ( Fig. 1 )

Cuvieria columnella Rang, 1827: 323 .

MATÉRIEL EXAMINÉ. — 110 spécimens (35°59’N, 05°30’O; 36°08’N, 00°30’O; 36°24’N, 01°00’O; 36°38’N, 02°00’O; 37°48’N, 02°44’E; 37°15’N, 02°55’E; 17°15’N, 145°44’O; 10°19’7”N, 58°53’4”O; 22°22’S, 166°24’E) .

DISTRIBUTION. — Cuvierina columnella a été considéré comme le plus typique du Pacifique oriental (Spoel 1970a). Il vit aussi dans le Pacifique central, l’Atlantique oriental (Canaries) et occidental ( Guyane) et la Méditerranée occidentale (mer d’Alboran) ( Fig. 1C ). Dans cette mer, il a valeur d’indicateur d’eau d’influence atlantique ( Rampal 1965, 1970).

REMARQUES

Cette espèce est plus grande que la précédente (L = 7-8 mm; moyenne 7,42 mm). Elle est effilée, presque cylindrique, aux bords quasi-parallèles sur une certaine longueur (E = 19,8 %) alors que C. urceolaris est ventru. L’arc de cercle correspondant à l’étalement de lm se répartit de part et d’autre du milieu de la coquille alors qu’il est postérieur chez C. urceolaris . Ces différences morphologiques nous autorisent à considérer ces deux taxons comme des espèces distinctes. Leur présence dans les mêmes stations, sans trace d’hybridation, confirme leur statut spécifique.

Figures

FIG. 1. — Genre Cuvierina Boas, 1886; A, divers aspects de la coquille, vue dorsale et antérieure; B, détails de la courbure; C, répartition géographique. Abréviations: Cc, C. columnella (Rang, 1827); Cs, C. spoeli n. sp.; Cu, C. urceolaris (Mörch, 1850); E, zone d’étalement longitudinal de la largeur maximum; L, Longueur; lm, largeur maximum; M, milieu de la coquille.Échelle: 1 mm.